Ceux des Maquis
Nous sommes en juin 1940, il y a 45 000 prisonniers dans les camps d’internement de Châteaubriant. L’eau manque. Emile ROUX dit « Milou », alors « arpète » chez Huard, se souvient : « Les corvées d’eau, en divers points de la ville, c’était l’occasion d’aider aux évasions » dit-il, rappelant combien de vêtements civils ont été fournis par ses camarades et lui . « C’était le début de l’Occupation, on ne prévoyait pas la pénurie de textile qu’il y aurait par la suite. Les gens venaient nous apporter des vêtements pour les prisonniers ».
Plus tard, un commando de Nord-Africains sera aidé par Emile ROUX. « Ils étaient une soixantaine, en mai 41, simples soldats, croyait-on, des militaires français arabes que les Allemands avaient renvoyés en France, à Châteaubriant. En fait, c’étaient des officiers qui avaient caché leurs insignes pour ne pas être envoyés dans les « oflags », camps d’officiers prisonniers de guerre. Ces Arabes étaient plus patriotes que nous-mêmes et ils avaient prévu, bien avant nous, que l’Amérique rentrerait en guerre ». Internés au lycée St Joseph, ils étaient employés le jour à défricher le quartier de Chécheux qui, s’il est construit maintenant, était à l’époque une butte couverte de taillis.
« On les connaissait bien, ils disposaient leurs outils de terrassement chez nous et nous discutions souvent. Le jour, ils allaient s’approvisionner en légumes chez Mme Rocher-Leclerc, rue Aristide Briand. C’est là que nous leur faisions passer des vêtements : au fond des cageots de légumes. Arrivés à 60, il n’en restait plus que 17 au moment de leur départ. Tous les autres s’étaient évadés. Nous leur avions fourni des boussoles de gosses et des cartes prises dans le calendrier des postes. La vente des cartes, surtout des cartes d’état-major était formellement interdite ».
1943 - Emile ROUX et quelques amis, dont Louis DENIEUL (qui sera tué plus tard à la Brosse en Sion les Mines) conçoivent le projet de gagner l’Afrique du Nord. Mais ils y renoncent quand ils apprennent que les Américains viennent d’y débarquer. Emile ROUX prend alors le maquis (il deviendra plus tard chef de section au Maquis de Saffré). Dans l’immédiat, trop connu dans la région, il rejoint un maquis à Combrée puis à Sainte Anne sur Vilaine.
Un jour, il revient tout de même, à Rougé, où il appartient au groupe Foch, éclaté en unités d’une dizaine de personnes maximum, réparties sur Châteaubriant, Rougé, Soulvache, Teillay, Messac. Des personnes qui ne se connaissent pas entre elles, voire qui se méfient les unes des autres jusqu’à ce qu’elles se rencontrent toutes ensemble, une soixantaine, dans le courant de l’année. Le responsable du groupe est Georges LAURENT, de Rougé.
Rôle du groupe : fournir le gîte et le couvert aux réfractaires du STO, voire leur trouver un travail. « Pour nous, c’était assez facile. Nous travaillions à la SOREMO, société de recherche et d’exploitation minière de l’Ouest. Nous étions la main d’œuvre chargée de creuser les mines ou les galeries de prospection, nous pouvions circuler à notre guise sans qu’on nous pose de questions. ».
Le STO (service du travail obligatoire) qui prétend envoyer de jeunes Français en Allemagne dans les usines désertées par les soldats allemands, a-t-il provoqué la constitution de maquis ? « Non, répond Emile ROUX, notre engagement date du début, de l’arrivée des prisonniers à Châteaubriant. On peut dire au contraire que c’est l’existence du maquis qui a aidé nombre de jeunes à fuir le STO ».
Georges Laurent
Georges LAURENT, 18 ans en 1939, est responsable JOC (Jeunesse Ouvrière Chrétienne) du secteur Segré-Châteaubriant. Il aime la vie, joue du théâtre, participe à la fanfare et au club de football de Rougé. C’est un chrétien fervent, il va à la messe tous les matins à Rougé, de bonne heure, avant son travail. Aux Mines de fer de la Bruz, où il travaille, il a obtenu des ouvriers l’observation d’une minute de silence, à 15 heures, le Vendredi-Saint, expliquant que le Christ, qui souffrit le supplice de la crucifixion, mérite bien un tel hommage.
Le soir de l’armistice (22 juin 1940), Georges LAURENT pleure. Il pleure aussi quand les bottes allemandes martèlent les galeries des mines de la Bruz.
Georges LAURENT travaille au bureau de Bonne Fontaine, près de Rougé. Un jour arrive un ordre de réquisition de mineurs (= travailleurs de la mine) pour le STO (service du travail obligatoire) : il raye le nom d’un père de famille de cette liste et inscrit son propre nom. Les mineurs sont réquisitionnés sur place. Georges LAURENT, logique avec lui-même, descend dans la mine avec les autres, au lieu de rester au bureau. C’est lui aussi, qui organise l’embauche de jeunes qui veulent échapper au STO, soit à la SOREMO, soit à la Mine de Rougé, soit à Bonne Fontaine. Au curé de Rougé qui lui dit de ne pas s’exposer inutilement, il répond : « Monsieur le Curé, on ne s’expose jamais inutilement lorsqu’on le fait pour la France ».
Avec Emile ROUX, Camille PASCAUD et d’autres amis d’enfance, avec sa foi chrétienne et son amour de la France, Georges LAURENT constitue un petit groupe d’une vingtaine de gars prêts à prendre le Maquis plus tard, quand il sera temps de prendre part aux combats de la Libération tant espérée. Originaires de Rougé, Fercé, Lalleu, Soulvache, membres de la JOC ou Communistes, Fils de Chouans et de Bleus, ils n’ont qu’un but : servir la France.
Les jeunes maquisards se réunissent à Rougé, tout près du château de La Jaunière, ou chez l’un d’eux, souvent chez Georges Laurent. Fernande BROSSEAU (qui deviendra plus tard la femme de Camille Pascaud) est chargée de faire « la statue » c’est-à-dire le guet. Elle va prévenir les gars à « La sondeuse » (le trépan qui cherche du minerai de fer) quand Mme GOUIN, femme du directeur de la SOREMO, repère l’arrivée de la Gestapo, afin que les jeunes réfractaires au STO puissent se cacher. Parmi eux Alphonse JOUHAULT, Pierre GAULTIER, René FILATRE dit Lagardère, et d’autres ... (1).
De l’argent, les maquisards n’en possèdent pas. Le maquis vit grâce à de bons fermiers comme Emile et Eugène MASSON à la Reboussière, ou comme M. MAHEUX du Bas Vallon, et d’autres. Ils s’entraînent au tir avec un revolver trouvé sur la route par M. Brosseau et avec un fusil mitrailleur récupéré lors de la débâcle de 1940, dans l’étang de Vioreau. Un jour, un jeune maquisard, Henri GOHIER, reçoit une balle. C’est le docteur DAYAUT qui le fait transporter à l’hôpital de Châteaubriant où le docteur GUINCHARD le soigne. Tous gardent le silence. La Gestapo ne saura rien de l’incident.
Georges LAURENT est assisté aussi de Pierre HERVE, originaire du quartier de Doulon à Nantes, créateur d’un groupe de maquisards à St Philbert de Grand Lieu, qui rejoint Rougé vers juillet 1943 et est chargé d’aller à Riaillé chercher de fausses cartes d’identité pour le groupe de Rougé. Les jeunes maquisards n’hésitent pas à cacher des armes où ils peuvent. Fernande Brosseau-Pascaud se souvient que, après son mariage, sous la paillasse de son lit, se trouvaient des fusils mitrailleurs (avant qu’ils ne soient convoyés vers le maquis de Teillay).
Les maquis de Teillay et Saffré
En Forêt de Teillay, à proximité de la Route aux Lièvres, non loin des « Roches aux Korrigans », un fouillis inextricable de chênes, de châtaigniers et de fougères géantes cache des cabanes rudimentaires de branchages enchevêtrés. Georges LAURENT assure les liaisons entre le maquis de Teillay et ceux des environs. Début juin 1944, dans la forêt, 84 maquisards sont sous les ordres du capitaine James LINARD qui, recherché par la Gestapo, doit se cacher. Les jeunes ne possèdent que deux mitraillettes, un barillet, un pistolet espagnol, un pistolet automatique et trois fusils donnés par M. MORDRET, forgeron de Teillay, et qui datent de la guerre de 1914-18. Dans la journée, certains jeunes font du charbon de bois et déposent les sacs à l’endroit convenu. A la place ils trouvent du pain et du saucisson.
Le cuistot ne dispose au début que d’un vulgaire petit faitout. Puis peu à peu, des bassines de dimensions respectables et des lessiveuses arrivent au camp et facilitent la cuisson des aliments. Dans la journée les jeunes sans travail « officiel » tuent le temps comme ils peuvent. Le soir ils s’exercent au maniement des armes, faisant tant de bruit que les Allemands croient qu’il y a trois à quatre mille maquisards dans cette forêt, ce qui explique sans doute qu’elle n’est pas attaquée ouvertement. Plusieurs mitraillages auront lieu cependant à l’aveuglette, mais ne feront aucune victime.
D’une superficie de 2500 hectares, la forêt de Teillay appartient à Mme MICHELET. Un certain nombre d’ouvriers travaillant à la scierie BUREL et « protégent » les maquisards, assurant en particulier le ravitaillement. Les gardes forestiers BOUSCAUD et FAUVEL assurent les liaisons entre Madame MICHELET, sa sœur Mlle RECIPON et le maquis.
Jean BUREL sera arrêté en décembre 1943 et mourra le 11 mars 1944 au camp de Buchenwald Jean BOUSCAUD, dénoncé le 12 juillet 1944, sera arrêté par les Allemands le 12 juillet ainsi que son épouse. Celle-ci sera relâchée le 12 août et retrouvera sa maison pillée par l’ennemi. M. Bouscaud ne sera relâché que le 29 août
Au bourg de Teillay, un Allemand, se pavane, plein de morgue, le fusil à l’épaule, son chien sur les talons. Il réside à l’hôtel Perrin. Un soir, un maquisard qui attend un parachutage d’armes et de munitions, décide de se débarrasser de lui. Mme PERRIN doit mettre un ruban blanc au balcon d’une fenêtre si l’Allemand sort et Emile JEANNEAU, dit « Zazou », l’attend pour lui loger une balle dans la tête. Mais ce soir-là l’homme se couche de bonne heure, et, de plus, le parachutage n’a pas lieu. !
Un soir, un jeune maquisard maladroit se blesse grièvement en maniant une arme. Le docteur AUBIN, d’Ercé-en-Lamée, le transporte dans sa propre voiture jusqu’à l’hôpital de Châteaubriant . Au retour, arrêté par des Allemands, il doit s’expliquer sur les traces de sang dans sa voiture. Roué de coups, il ne prononce pas une parole compromettante pour le Maquis.
6 JUIN 1944 – Débarquement allié sur les plages de Normandie. Les groupes de maquisards reçoivent l’ordre de se regrouper en forêt de Teillay. « Nous nous y sommes retrouvés 117 : les maquisards et un certain nombre de réfractaires STO que nous avions aidés et qui nous ont rejoints ». Le 22 juin 1944, ils lèvent le camp et gagnent le carrefour du Pavillon où ils se tiennent cachés jusqu’à la brune, couchés dans des tas de fagots appartenant à M. LEBRETON. En deux voyages, dans le camion de la Minoterie LEBEC de Nort sur Erdre, les maquisards de Teillay sont concentrés sur Saffré : « Nous étions alors plus de 300, à la ferme des Brées, en lisière de forêt. Cette concentration trop importante, jointe à un certain nombre d’imprudences et au manque d’armes, nous a été fatale ». (voir aussi page 210)
Les maquis en Loire-Inférieure
La principale mission des groupes de maquisards est de se préparer à saboter, le moment venu, les voies de communication afin de retarder l’arrivée des renforts allemands sur le front et permettre aux troupes alliées une avance plus rapide. A l’époque nul ne sait où aura lieu le débarquement des Alliés.
Au cours de l’année 1943 et début 1944, vingt-trois groupes se constituent en Loire-Atlantique. Dix-huit au nord forment l’ossature du Maquis de Saffré et cinq au sud de la Loire, le Maquis Sud-Loire. Huit des groupes à la base du Maquis de Saffré sont constitués par Briac LE DIOURON (Commandant Yacco dans le Maquis) nommé « Départemental Maquis de Loire-Inférieure », en novembre 1943, dans le cadre de l’Armée Secrète de l’Ouest, sous l’autorité du Général AUDIBERT. L’action des maquisards est coordonnée par cinq « DMR », délégués militaires régionaux (quatre Français et un Américain), qui ont qualité pour transmettre les directives du gouvernement de la France Libre.
Afin de ne pas attirer l’attention de l’ennemi, et parce qu’il faut bien subsister, presque tous ces résistants travaillent dans des fermes ou des entreprises artisanales. L’instruction au maniement des armes a lieu la nuit .
Les groupes dépendant du MAQUIS DE SAFFRE sont basés à : La Maison Rouge (a), les Touches, Rougé, Châteaubriant, Teillay, Nozay, Saffré, Nort-sur-Erdre, Blain, Guéméné-Penfao, Héric, Bouvron, Joué-sur-Erdre, Fay-de-Bretagne, Saint-Emilien-de-Blain, Notre-Dame- des-Landes, La Chevallerais, La Meilleraye-de-Bretagne.
« En plus de l’aide aux réfractaires du STO, nous avions quelques coups de main à faire. Le 6 mai 44, par exemple, nous [Emile ROUX, Claude MORIN] avons fait sauter un train, à Soudan, qui transportait des moteurs d’avion. Les charges explosives avaient été préparées dans la cuisine du père Joseph CHIRADE, à la ferme de la Garenne ».
« Nous avions des antennes à Châteaubriant, raconte encore Emile ROUX, Le PAUTREMAT, par exemple, ou l’agent de ville PODEUR, ou le gendarme JARNO. Ils nous donnaient des renseignements. Par contre, si nous connaissions, comme beaucoup d’autres, l’existence du groupe Letertre, nous n’avions pas de liaisons avec eux ».
La constitution du Maquis de Saffré
6 juin 1944 : débarquement allié en Normandie. Radio-Londres diffuse le message : « Le Canal de Suez est en feu ». C’est le signal attendu, l’ordre de mobilisation des maquis. En même temps que le débarquement, a lieu un important parachutage d’armes près de Malestroit dans le Morbihan, et d’un bataillon d’hommes appartenant aux FFL (forces françaises libres). Quand il entend l’appel de partir au Maquis, Georges LAURENT, chef de section au Maquis de Teillay, part aussitôt.
8 juin 1944. Liaison des responsables de Loire-Atlantique avec les Forces Françaises Libres au Maquis de Saint-Marcel (Morbihan).
Nuit du 16 au 17 juin 1944. Regroupement d’une centaine d’hommes dans la forêt de Saffré en vue d’un parachutage destiné à armer la résistance locale. Les hommes sont chargés d’aménager le terrain dit « des Gouvallous » et de s’exercer au maniement des armes (en nombre très insuffisant) et au « close-combat ». Trente jeunes logent dans les dépendances de la ferme des Brées. D’autres s’installent en forêt sous des guitounes faîtes de branches de sapins. Un « poste de sécurité » est disposé au lieu-dit « le Wagon » , deux autres sont installés sur le chemin qui conduit à la ferme des Brées, et un quatrième se trouve à proximité de la ferme du Pas du Houx. (voir document D 31).
18 juin 1944. Attaque du maquis de St Marcel (Morbihan) par les Allemands : 30 Français tués, 60 blessés, 15 prisonniers, 300 à 500 Allemands tués. Les prisonniers français sont atrocement torturés par les Allemands, abattus, pendus ou parfois crucifiés pour impressionner la population. Les échappés du Maquis de St Marcel se retrouveront pour partie au Maquis de Saffré.
A Saffré, le terrain des Gouvalous est défriché, les fossés sont comblés, la piste d’atterrissage mesure 1800 mètres mais le parachutage est retardé en raison des conditions atmosphériques défavorables.
22 juin 1944, le groupe de Teillay est attaqué par les Allemands qui n’osent cependant pas s’aventurer en forêt. Décision est prise de regrouper les hommes dans la forêt de Saffré. Le transfert s’effectue les 23 et 24 juin dans un camion du minotier LEBEC de Nort sur Erdre.
Le maquis de Saffré comprend environ 310 hommes : une compagnie de 160 hommes à la ferme des Brées, P.C. du maquis, une compagnie de 110 hommes au Pas du Houx, La Volante (20 hommes), l’état-major, l’intendance, et des aviateurs récupérés, 20 hommes.
L’attaque du Maquis de Saffré
Le 28 juin 1944, vers 5 heures du matin, plus de 2.000 Allemands et miliciens équipés d’armes automatiques et de canons légers tentent d’encercler la forêt de Saffré mais n’y parviennent pas tout-à-fait : la limite nord reste ouverte car une partie des assaillants s’est perdue dans le dédale des petites routes.
Du côté du maquis, 60 hommes seulement sont armés.
La résistance des postes de garde est héroïque, en particulier celle du jeune Georges CHAUMEIL (18 ans). Pendant ce temps-là, protégés par les murs des bâtiments de la ferme des Brées, les hommes sans armes, en file indienne, longent des buissons qui clôturent le champ de blé, derrière la ferme, et rejoignent la forêt proche de 400 mètres environ. Les maquisards, par groupes d’une dizaine, disparaissent dans l’épaisseur des fourrés. Ils auront la vie sauve, dans l’immédiat. Mais la Gestapo en arrêtera quelques-uns, ainsi que des personnes liées au Maquis de Saffré. En tout 18 personnes mourront en déportation . (voir aussi page 212)
Autour de la ferme de Brées, après deux heures de combat, les Allemands sont maîtres du terrain. Quatre maquisards sont morts au combat. Neuf prisonniers, selon Alfred Gernoux ; « furent traînés et rassemblés à l’angle d’un champ en bordure d’un chemin près du Pas-du-Houx. C’est à coups de talons de bottes, à coups de crosses, qu’ils furent achevés. Afin qu’on ne put les reconnaître, les Boches s’acharnèrent à défigurer leurs victimes. On retrouva des crânes écrasés, des bérets ayant des cheveux collés sur l’étoffe et de l’autre côté des empreintes de talons. On ne peut imaginer barbarie et férocité plus grande ».
Treize jeunes seront enterrés sur place : Maurice Bourré, Jean Chatelier, Georges Chaumeil, Albert Chauvin, Jean-Marie Couedel, Robert Geffriaud , Auguste Guiheneuc , Félix Guillet, Louis Loiziel, Joseph Nauleau (fils), Paul Orieux, Baptiste Rabin, Françis Renaud. [Robert Geffriaud sera longtemps « le maquisard inconnu »]
Georges LAURENT réussit à en réchapper avec Camille PASCAUD. Camille Pascaud s’enfuit par un côté, il aura la vie sauve. Georges Laurent tombe sur une patrouille allemande qui l’arrête. Il sera fusillé à La Bouvardière.
Camille Pascaud, lui, regagne Rougé, et se cache quand le jeune Robert BROSSEAU vient le prévenir que les Allemands sont au bourg et cherchent le père LAURENT pour qu’il reconnaisse son fils.
Camille PASCAUD était « enfant de l’assistance publique » comme on disait à l’époque. En avril 1940, il a 16 ans, il est engagé volontaire dans la marine, pour 5 ans. Il fait d’abord l’école des fusiliers marins et rejoint Londres, où le Général de Gaulle ne veut pas de lui car il est trop jeune. Il embarque alors sur différents navires et se retrouve en Afrique du Nord puis à Toulon au moment du sabordage de la flotte le 27 novembre 1942. (il en a d’ailleurs ramené un drapeau de 5 à 6 mètres de long qui flottera plus tard à l’église de Rougé, pendant au moins trois mois à partir de la Libération, installé fièrement par le maçon Auguste Brillet et par un couvreur, M. Barat).
Camile Pascaud rentre alors à Rougé où il vient habiter chez les parents Brosseau. Il dispose d’une fausse carte d’identité au nom de Roger Lemoine, procurée par M. Daviais, celui dont le buste est placé sur la Place de la Petite Hollande à Nantes..
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« Il fallait toujours se méfier. Beaucoup de gens savaient qu’il y avait un petit groupe de jeunes « résistants » qu’on disait « exaltés », « têtes brûlées » ou « pêcheurs de lune ». Et puis certains gendarmes français nous poursuivaient sans pitié » se souvient Fernande PASCAUD.. Des « collabos » et des « bons Français » préfèrent rester tranquillement dans leur lit. Et quelques individus peu recommandables, se livrent à des pillages en se faisant passer pour des maquisards. Les vrais Maquisards, eux, cachent des jeunes, se préparent pour le maquis, voire organisent des coups de main audacieux, comme l’attaque en gare de Soudan, d’un train qui transportait des armes, mais aussi des meubles et objets volés aux Français par les Allemands. (c’était dans la nuit du 6 au 7 mai 1944).
Les victimes du Maquis de Saffré
En plus des 13 maquisards tués sur place, on compte :
27 fusillés à la Bouvardière à Saint-Herblain, le 29 juin 1944
Parmi eux : Georges LAURENT (il avait 23 ans) de Rougé, Alexandre TEMPLE de la Meilleraye, Georges DURAND de St Aubin des Châteaux, Jean RIGOLLET de Nozay
2 fusillés à la prison Lafayette le 13 juillet 1944
(dont Jean TEMPLE de La Meilleraye)
18 personnes arrêtées par la milice et la Gestapo, seront arrêtées peu après, en raison de leurs liens réels ou supposés avec le maquis de Saffré : par exemple les jeunes Marcel FOURNY (mort au Struthof, 17 décembre 1944) et Etienne DOUCET (mort au Struthof, 6 novembre 1944), fils des fermiers et Pierre VALOTAIRE, ouvrier agricole, (mort à Ladelung 5 décembre 1994) . Elles ne reviendront pas.
Au total 60 victimes.
Liste des victimes : http://chouannerie.chez-alice.fr/De...
Du côté des Allemands, de source allemande, environ 180 morts et 200 blessés.
Après la tragédie de Saffré, les maquisards reçoivent l’ordre de se disperser. Emile ROUX refuse, et se retrouve avec une trentaine de camarades dans la forêt de la Brosse, non loin de la Hunaudière en Sion les Mines. C’est dans ce groupe que, le 11 juillet 1944, seront tués Louis DENIEUL et Robert GASTINEAU, tous deux de Châteaubriant, Paul LEBORDAIS et Roger COLLET de Saint Vincent des Landes. Le frère de Roger Collet, Auguste, laissé pour mort, en réchappera. Raymond LEBORDAIS mourra en déportation. (voir page 52)
Nouvel ordre de dispersion du maquis, nouveau refus. Les maquisards, ou ce qu’il en reste, se réfugient à Limèle (en Sion les Mines), dans les vieilles mines de fer. La résistance continue. Les Allemands sont sur leurs gardes. Les embuscades et sabotages se multiplient notamment : destruction d’une porte d’écluse au Pas Héric, immobilisant sept péniches destinées à transporter du matériel de guerre.
Le 4 août 1944, sur la route de Pannecé à Teillé, trois maquisards se trouvent face à face avec une patrouille allemande. Pierre RIALLAND, chef de groupe de Joué-sur-Erdre, est tué pendant l’accrochage.
Heureusement arrive la Libération, ce 4 août 44, de Châteaubriant. Les maquisards respirent : ils vont enfin pouvoir bénéficier d’une organisation et surtout de moyens de défense (les armes destinées au maquis de Saffré sont parachutées ... le lendemain ... de la tragédie). Un parachutage, les jours suivants, sur le champ de courses de Châteaubriant, apporte des armes.
Les maquisards ont connu des conditions de vie difficiles et n’oublieront jamais l’aide qui leur a été apportée par la population : « les gens qui nous logeaient et nous nourrissaient risquaient plus que nous. Nous, nous pouvions décrocher, eux ils savaient qu’ils devaient rester sur place. Il faut que tout le monde sache l’importance de l’aide qui nous a été apportée » a dit Emile ROUX.
A la Libération, les maquisards seront enrôlés dans les FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) : « mais nous on ne voulait pas. On souhaitait rester « groupe maquis ». On avait notre fierté. On reprochait à trop de FFI d’être devenus résistants après la Libération, quand ils pouvaient le faire à moindres risques » dit encore Emile ROUX. Les maquisards seront incorporés dans les 3è et 5è bataillons où les officiers étaient, heureusement, d’anciens maquisards. Ils ont ainsi participé à la Libération de Fay de Bretagne et de la poche de Saint-Nazaire.