Mai 1940
Le 10 mai 1940, l’Allemagne attaque la France, en une fulgurante offensive, en contournant l’inutile ligne Maginot. L’ennemi arrive par le Nord, occupant les Pays-Bas, la Belgique, et le Luxembourg. La Werhmacht attaque en même temps dans les Ardennes. Une grande partie des soldats français et anglais sont pris comme dans un étau. Vers la mi-mai, les troupes françaises et britanniques qui font retraite depuis le Nord de la France et la Belgique, se replient sur Dunkerque. Les Allemands lancent attaque sur attaque, les troupes alliées doivent se réfugier sur les plages, y construisant des hôpitaux de fortune. Environ 860 navires assureront l’aller-retour pour l’Angleterre évacuant environ 350 000 hommes. Une certaine aigreur se manifeste chez les Français qui voient les Britanniques embarquer sous leurs yeux. Des Français (y compris des Castelbriantais), déjà embarqués, sont rejetés à la mer.
A la mi-juin, deux divisions britanniques et 10 000 soldats polonais quittent encore la Normandie pour l’Angleterre, sous les bombardements de la Luftwaffe. Plus de 6000 hommes périront en mer. L’armée française, qui couvre l’évacuation commune, abandonnera 150 000 prisonniers aux Allemands.
A Châteaubriant en mai 1940, l’exode amène des Français du Nord et de l’Oise, (et notamment des personnes handicapées, évacuées d’un établissement spécialisé), des Belges, des Parisiens encore, des Normands, avec le triste cortège qui caractérise tout exode : bicyclettes, charrettes à bras, charrettes attelées, piétons harassés, rares automobiles. Tous véhiculent la terreur : « La puissance des Boches est irrésistible. C’est cuit, nous avons perdu la guerre ! ». Ils jettent encore plus la panique quand, rappelant les souvenirs de leurs pères, ils racontent que les Allemands coupent les mains des hommes et violent les femmes. Nombre de familles castelbriantaises s’enfuient au Sud-Loire [elles reviendront quelques semaines après].
29 mai 1940 : l’immeuble du "Cercle Catholique" (actuellement l’hôtel "Le Châteaubriant") est mis à disposition du Comité d’Accueil des Réfugiés. Les Scouts, dirigés par Jean GAUCHET et Etienne DE TUGNY, s’occupent de l’accueil, et des cantines et comptoirs de vivres installés à la Mairie et aux six entrées de Châteaubriant sur les routes qui mènent à la Bretagne et au Sud-Loire. Les industriels locaux et le directeur des Terrasses fournissent et transportent du matériel, s’efforçant de trouver du travail aux réfugiés. La population se fait tirer l’oreille : « Monsieur le Maire regrette que le public ne mette pas plus d’empressement à loger les réfugiés » est-il écrit dans les compte-rendus de Conseil Municipal.
A leur tour, pris de panique, nombre de Castelbriantais fuient, les uns dans la campagne environnante, d’autres jusqu’au delà de la Loire. Ils reviendront plus tard quand ils sauront que les Allemands se comportent « correctement », affirmation juste au début de la guerre.
Devant cette débandade, le maire, Ernest Bréant, siège jour et nuit à la mairie, attendant les ordres, prêt à prendre les mesures qui s’imposent. Il faut faire venir tous les jours des quantités importantes de denrées, des tonnes de pommes de terre, pâtes, pâté de campagne, bouillon Kub, sucre. Le maire réquisitionne les boulangers pour nourrir toute la population sédentaire ou passagère. A sa demande, les conseillers municipaux, du moins ceux qui n’ont pas fui, se relaient pour l’aider à tenir tête et à prévenir toute éventualité.
La "défense passive" s’organise, une circulaire préfectorale demande de trouver des abris ou de creuser des tranchées pour les enfants des écoles et la population. Le maire rétorque "qu’en raison de la situation en cuvette de la ville, il est difficile de creuser des tranchées sans s’exposer à l’inondation" et encourage avec insistance les Castelbriantais à creuser des tranchées particulières dans les jardins ... mais le problème demeure pour les habitants du centre-ville ! Deux sirènes d’alarme sont proposées pour prévenir les habitants : celles de l’usine HUARD et de l’usine de confection M. DURAND RICHER.