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Histoire de la laïcité

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Ecrit le 10 mai 2006

Une intéressante exposition à la Maison du département, retrace l’histoire de la laïcité et montre des documents d’époque concernant Châteaubriant et les communes environnantes.

Le fait religieux à travers l’histoire
Droits de l’homme et religions
Loi de séparation de l’église et de l’Etat
Inventaires à Châteaubriant
Blocards et Mascurauds
Un enterrement civil

 Le fait religieux à travers l’histoire

De tout temps les hommes ont inventé des divinités pour expliquer les phénomènes naturels. Le peuple des mégalithes adorait la Déesse-Mère (déesse de la Fécondité et de la Mort) et célébrait le culte du Cerf. Les Aryens, les Romains et les Germains célébraient la Trinité, un dieu unique à trois têtes. Chez les Celtes, il existait aussi des triades de divinités : une seule divinité en trois personnes.

Outre leurs dieux célèbres (Zeus, Jupiter and Co), les « grands hommes » des temps anciens prônaient l’adoration d’idoles et tentaient même d’apparaître eux-mêmes comme des divinités. La religion juive est la première religion monothéiste : elle est à l’origine de deux autres grandes religions monothéistes : le christianisme et l’islam.

En Occident, les Chrétiens apparaissent vite comme des empêcheurs d’idolâtrer en rond, incitant à la destruction des idoles et ne reconnaissant pour divinité qu’un certain Yahvé et son fils Jésus. Bouleverser ainsi l’ordre social ! On n’a pas idée ! Le premier massacre de chrétiens a lieu à Lyon en 177.

En 496, Clovis, roi des Francs, en difficulté dans la bataille contre les Alamans, ne sait plus à quel saint se vouer.

« Dieu de Clotilde, si tu me donnes la victoire, je me convertirai à la religion chrétienne » dit-il. Et ça marche !

C’est ainsi que le 25 décembre 496, abandonnant ses amulettes de païen, Clovis se fait baptiser à Reims.
L’Eglise catholique est désormais sous la protection des Rois de France.

Charlemagne est sacré Empereur par le Pape lui-même, le 25 décembre 800.

Pendant des siècles la Religion catholique a un lien étroit avec la Royauté : « un Dieu, un roi, une foi, une loi » chantait Pierre Gringoire dans son « Chant Royal »

Aux 15e-16e siècles, des humanistes et des théologiens (Erasme, Pic de la Mirandole, Luther ...) se montrent très critiques à l’égard de l’Église catholique, de ses princes, de ses fastes, et de ses « indul-gences » En 1517 s’annonce le protestantisme (Luther, puis Calvin) dont les écrits bouleversent l’ordre social autant que l’ordre catholique. Les premiers massacres de Protestants ont lieu en 1529.

Par l’édit de Châteaubriant, le 27 juin 1551, le roi Henri II renforce les mesures contre l’hérésie : interdiction d’héberger des luthériens, de voyager à Genève, ou même de discuter de religion.

La devise de la République sur le tympan d’une église : http://fr.wikipedia.org/wiki/Image:Liberte-egalite-fraternite-tympan-eglise-saint-pancrace-aups-var.jpg

Catholiques et Protestants s’étripent alors pendant près de 40 ans ! Tortures, massacres, pendaisons, bûchers pour les « mal sentants de la foi ». De bien belles attractions pour le peuple. Le roi lui-même assiste parfois aux bûchers.

Lorsque Henri de Navarre doit choisir « la mort ou la messe », il choisit la messe, ce qui lui permet de devenir le Roi Henri IV.

30 avril 1598 : l’édit de Nantes met (provisoirement) fin au conflit entre Catholiques et Protestants, reconnaissant la liberté de conscience, rétablissant les droits civils des Protestants, les autorisant à exercer leur culte, à disposer de lieux de refuge et d’une armée potentielle, et fixant une dotation de 45 000 écus pour le traitement des pasteurs.

Cet Edit de Nantes, qui faisait entrer la tolérance dans la société française, est révoqué par Louis XIV en 1685.

XVIIIe siècle : les « philosophes » dénoncent le fanatisme catholique et revendiquent la tolérance. Certains mêmes se déclarent athées. Voltaire publie un « traité sur la tolérance » en 1764. Un édit de 1787, sous la responsabilité de Loménie de Brienne, officialise un état-civil protestant, reconnaissant ainsi une minorité religieuse qu’il n’est plus question de réprimer par la force. Une amélioration du statut des Juifs est envisagée (leur installation en France est interdite depuis 1394).

 Droits de l’homme et religions

Mais treize siècles d’union étroite entre la religion et la royauté ont façonné les esprits. A l’Assemblée Constituante, qui fait suite aux États Généraux de 1789, la quasi totalité des députés pense que la loi est, par nature, d’essence religieuse. La déclaration des Droits de l’Homme (26 août 1789) déclare : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses ». Les Protestants sont admis à la pleine citoyenneté en décembre 1789. Les Juifs devront attendre septembre 1791. Un décret d’avril 1790 ne reconnaît plus le catholicisme comme « religion d’État ».

Malgré cela l’État n’entend pas laisser le fait religieux au domaine du privé : il craint le retour du royalisme. La Révolution admet le principe d’une Église contrôlée et étatisée : la Constitution civile du Clergé établit un contrôle politique des prêtres devenus fonctionnaires et instaure l’élection populaire pour la nomination des curés et des évêques. Il s’ensuit une rupture entre l’Église et la Révolution.

La Constitution de l’an III (1795) fonde la séparation des pouvoirs religieux et laïques. Pour peu de temps. Bonaparte signe un Concordat (juillet 1801) qui reconnaît le catholicisme comme « religion de la majorité des Français ». L’Eglise renonce à ses biens sans espoir de retour, son personnel étant rétribué par l’Etat. En 1806 Napoléon rétablit le culte israélite.

En avril 1802, la loi consacre l’égalité de tous les cultes. Après la chute de l’Empire, le roi Louis XVIII fait du catholicisme, à nouveau, la religion de l’État. Mais la compromission de l’Eglise avec l’Etat amène en 1830 un vif anticléricalisme. Qui amène des expulsions de religieux : en septembre 1831, les moines de La Meilleraye, par exemple.

Lors de la révolution de 1848, les évêques recommandent le ralliement à la République, en affirmant que sa devise « Liberté, égalité, fraternité » est l’expression la plus pure de la doctrine évangélique. En retour, la Constitution établit le principe de la liberté de l’enseignement, sans restriction. Mais, concrètement, la peur du désordre fait de l’Église la garante de l’ordre établi : l’Église, qui avait recommandé le ralliement à la République, accepte trois ans plus tard l’instauration de l’Empire, ouvrant ainsi une nouvelle alliance du trône et de l’autel.

1871 : la période de « La Commune ». On y décrète la séparation de l’Église et de l’État. Cet intermède sera écrasé dans le sang. Mais l’idée fait son chemin, les Républicains rejettent de plus en plus « le gouvernement des curés ». Jules Ferry demande, et institue en 1881-82, une instruction publique, dégagée de toute référence à des religions.

A Nantes la condamnation de la laïcité et la défense des écoles religieuses mobilisent les forces catholiques. La France de l’Ouest reste largement monarchiste mais les esprits se calment peu à peu jusqu’à ... l’affaire Dreyfus en 1897 qui voit s’affronter, d’un côté, les Républicains, défenseurs de l’innocent, accusé parce que juif, et de l’autre les cléricaux faisant cause commune avec l’État-major militaire et les antisémites.

L’Eglise, farouchement antirépublicaine, supporte mal la laïcisation progressive de la vie locale. A la sortie de l’affaire Dreyfus, Waldeck Rousseau fait adopter la loi de 1901 qui formalise le droit d’association et impose aux congrégations religieuses de demander une autorisation préalable. La plupart d’entre elles refusent. Emile Combes fera fermer plus de 10 000 écoles religieuses. Il prépare en outre une loi de séparation des Églises et de l’Etat. Mais son ministère est renversé en 1905. Son successeur, Maurice Rouvier, reprend le projet : ce sera la loi de 1905, dont le rapporteur est Aristide Briand. Une loi de pacification « juste et sage » comme dit Jean Jaurès.

 La loi de séparation de l’Église et de l’État

Le 11 décembre 1905, la loi de séparation des Églises et de l’État est promulguée, assurant la liberté de conscience, garantissant le libre exercice des cultes mais n’en subventionnant aucun. Les édifices servant à l’exercice des cultes sont laissés gratuitement à la disposition de futures « associations cultuelles » élues par les fidèles et composées en majorité de laïcs. La loi prescrit l’inventaire des biens ecclésiastiques.
Tout se passe à peu près calmement jusqu’à ce que le pape Pie X condamne violemment la loi de Séparation. Les inventaires provoquent alors des troubles dans de nombreuses paroisses : portes des églises barricadées, fidèles montant la garde devant les édifices, intervention des forces de l’ordre, etc.

Inventaires

A Châteaubriant la bataille fait rage, verbalement, entre Le Journal de Châteaubriant*(plutôt classé à gauche) et le Courrier de Châteaubriant *(mani-festement très à Droite) qui écrit, au sujet des inventaires « nous attendons maintenant de pied ferme les ambassadeurs de la gueuse » (la Gueuse : appellation insultante destinée à La République).

A l’église St Nicolas l’inventaire est prévu pour le 10 février 1906. Quelques jours avant, le Conseil de Fabrique se réunit, un des présents souhaite qu’il y ait « un acte qui oblige le pouvoir à faire emploi de la force et de l’effraction ». Le 10 février à 9 heures, il y a 400 fidèles dans l’Eglise. Le Conseil de Fabrique lit une protestation solennelle au receveur de l’enregistrement chargé de l’inventaire. Le Bureau des Marguilliers déclare à son tour refuser de coopérer. Alors le receveur se retire. Les fidèles se séparent après le cantique « nous voulons Dieu » et une bénédiction du Saint Sacrement. (curieu-sement, cet inventaire raté porte la date du 10 mars 1906 dans l’inventaire de la direction générale des Domaines).

Le journal de Châteaubriant raconte la même scène, en expliquant que nombre de fidèles présents « y étaient venus à contre-cœur » (...). Il s’y trouvait surtout « des femmes "convoquées" par la présidente d’une association religieuse locale ».

De la même façon l’inventaire ne peut se faire à Saffré le 5 mars 1906, à Moisdon le 5 mars où le Curé déclare : « Nous sommes ici des catholiques pratiquants. Tous nous sommes fiers de faire partie de cette grande armée dont le chef est le Pape. Lui seul a le droit de commander à nos consciences et à lui seul nous avons devoir d’obéir. (...) ». L’inventaire, prévu le 6 mars à La Meilleraye ne peut se faire « Les quelques blocards et comitards qui ont toujours à la bouche les mots de liberté et d’égalité et n’en réclament que pour eux, ont dû voir que les vrais catholiques sont décidés à revendiquer leur part », écrit l’Ami de la Vérité, le dimanche suivant.

A Abbaretz, le 6 mars également, le receveur trouve dans l’église 300 hommes et 400 femmes. « Nous ne vous ouvrirons aucune porte. Nous vous laissons tout l’odieux du crochetage » déclare le Curé. « L’agent des Domaines a écouté silencieusement, a salué et est parti » dit l’Ami de la Vérité qui conclut : « Les quatre gendarmes qui l’avaient accompagné s’étaient tenus à belle distance, à l’entrée du bourg ; ils sont repartis avec leur fiscard sans tambour ni trompette »

A la mi-mars 2006, Le Courrier de Châteaubriant signale la création à Erbray de « l’action libérale populaire, ligue patriotique des Françaises » qui s’est constituée « pour revendiquer une place au grand soleil de la liberté ». Une conférencière, Mme Demangeat, tient une réunion à Erbray le 9 mars 1906, montrant « la nécessité de réagir contre le mal envahissant, contre la marche toujours montante de cette boue fétide et empoisonnée qu’apporte la mort des âmes créées à l’image de Dieu. C’est le poison des mauvais livres qui s’achètent aux foires (...). Ce sont les mauvais journaux où l’on prétend ne lire que les nouvelles, le cours des marchés, mais où l’on puise tous ces préjugés, toutes ces défiances du prêtre, toutes ces calomnies stupides que l’on colporte ensuite naïvement ou méchamment ». (C’est le Journal de Châteaubriant qui est ainsi visé).

L’inventaire à Châteaubriant eut lieu finalement le 30 novembre 1906. Ce matin-là, à 5 h, le clergé se rend à l’église. Le sacristain sonne l’Angelus à 5 h 30, comme d’habitude, puis, apercevant par les lucarnes des cloches des gendarmes et de soldats qui arrivent à l’église, il sonne le glas. (Les soldats étaient du 65e et du 98e régiments d’infanterie et du 3e régiment de dragons ; les gendarmes n’étaient pas ceux du pays).
Toutes les portes de l’église et des sacristies avaient été fermées. Quelques minutes avant 6 h, on frappe à la sacristie qui est au sud de l’église, successivement trois coups et une voix crie « Au nom de la Loi, Ouvrez ». Personne ne répond ni n’ouvre la porte. Alors « des coups répétés de hache et de levier furent portés à la porte. Le travail d’effraction dura au moins 10 minutes. Des éclats de bois furent projetés jusque dans l’intérieur de l’église » rapporte le registre du Conseil de Fabrique.

Quand la porte céda, un soldat marcha en avant porteur d’une torche.
« En même temps entrèrent pêle-mêle des individus dont quatre étaient ceinturés d’écharpes tricolores » (il y avait notamment M. Lavigne, Sous-Préfet et M. Lebrun, secrétaire de la Sous-Préfecture). Le commissaire principal à la sûreté générale dit, en désignant le groupe de M. le Curé : « S’ils ne bougent pas, laissez-les. Sinon, dehors ! ». La porte de la sacristie côté nord est fracturée aussi de même que les portes des placards. L’inventaire est fait par le receveur « et un petit scribe » - « accompagnés de deux soldats porteurs de torches » car, en ce petit matin de la fin-novembre, « il faisait nuit noire » :

- 37 vases avec fleurs artificielles
- une bannière et trois étendards
- quatre falots dorés de procession
- un seau à charbon - un balai
- cinq surplis et aubes
- vieux livres de messe
- deux dessus d’autel
etc.

Quand les soldats se retirèrent, le curé alla chercher le Saint Sacrement qu’il avait déposé au presbytère. « La foule des fidèles n’étant plus retenue par le barrage des soldats, emplit la nef. Le cantique « nous voulons Dieu » fut chanté et un salut de réparation fut donné par M. le curé. L’émotion étreignait tous les cœurs » dit le registre du Conseil de Fabrique.

Globalement sur les 33 communes du Pays de Châteaubriant :
- 5 communes ont connu des manifestations dures : Moisdon, La Chapelle Glain, Petit Auverné, Saffré et Marsac sur Don
- 18 communes ont connu des manifestations moyennes : Fercé, Villepôt, Rougé,
Châteaubriant, Erbray, St Julien de Vouvantes, Louisfert, Issé, Grand Auverné, La Meilleraye, St Vincent des Landes, Jans, Nozay, Vay, La Grigonnais, Puceul, Abbaretz et Treffieux.
- 7 communes ont connu des manifestations symboliques : Soulvache, Soudan, St Aubin-des-Châteaux, Ruffigné, Sion-les-Mines, Lusanger, Mouais
- 3 communes ne se sont pas opposées aux inventaires : Noyal sur Brutz, Juigné-des-Moutiers et Derval

 Humour ? Blocards et sous-Mascurauds

Le Courrier de Châteaubriant, à la mi-mars 1906 s’exerce à la raillerie en évoquant : « quelques blocards de marque, membres du Comité local des Sous-Mascurauds, s’étaient rendus à l’Eglise St Jean de Béré à l’heure fixée pour l’inventaire ....(etc) ».

Explication : un « blocard » est un partisan du « Bloc des gauches » qui a remporté les élections d’avril 1902. Et Alfred Mascuraud est celui qui créa un « comité républicain pour la défense du commerce, de l’industrie et de l’agriculture ».

L’ami de la Vérité, en date du 11 mars 1906 rapporte l’échec de l’inventaire au Gâvre et conclut : « Seul un anarchiste à longue barbe affamé de curés, applaudit de loin l’infâme besogne des cambrioleurs. C’était sans doute le délégué de quelques mouchards venus, dimanche dernier, à la messe, pour espionner leur curé. Peut-on d’ailleurs prêter une autre intention à des chevaliers de la casserole, qu’on ne voit jamais à l’Eglise ? »

Les blocards, les comitards, les mouchards, les fiscards, les anars ... il y aura plus tard les laïcards...

 Lexique

La laïcité désigne le principe de séparation du pouvoir politique et administratif de l’Etat et du pouvoir religieux, ainsi que le caractère des institutions qui respectent ce principe.

Selon ce principe, la croyance religieuse relève de l’intimité de l’individu. Les convictions religieuses-ou l’absence de conviction - de chacun, sont alors volontairement ignorées par l’administration.

La laïcité implique un enseignement où la formation religieuse (dans le sens enseignement de la foi) est absente. On parle, dans les programmes scolaires d’enseigner le « fait religieux », la « dimension religieuse de l’Histoire » : un enseignement qui ne se confond pas avec une nouvelle forme de catéchèse.
Il ne s’agit en quelque sorte que de décrire des « us et coutumes », et de présenter chaque religion d’un point de vue extérieur à celle-ci .

Note :

- au masculin et au neutre, laïc (adjectif ou nom) désigne le non-clerc (cf ci-dessus) et laïque ce qui a trait à la laïcité. C’est pourquoi on dit « l’enseignement laïque ».
- au féminin on doit utiliser la forme laïque dans tous les cas.

Source


Ecrit le 17 mai 2006

 Un enterrement civil à Derval

Autour du 15 août 1539, le roi François 1er signe, à Villers Cotterêts, une ordonnance par laquelle tous les actes légaux et notariés devront être rédigés en français. (et non plus en latin), ou plutôt en « langue d’oïl », langue pratiquée dans le bassin parisien et sur les bords de la Loire.

Il institue ce qui deviendra l’état civil en exigeant des curés des paroisses qu’ils procèdent à l’enregistrement des nais-sances, des mariages et des décès.

Mais se pose alors le problème des protestants dont la croyance n’est pas reconnue par la monarchie française : les mariages consacrés secrètement par des pasteurs protestants n’ont aucune valeur au regard de la loi et les enfants nés de ces unions sont considérés comme enfants illégitimes et ne peuvent ni suc-céder à leurs parents, ni hériter de leurs biens.

Louis XVI, le 19 novembre 1787, sans reconnaître la liberté de culte des non-catholiques, impose aux prêtres d’enregistrer sur leurs livres les naissances, mariages et décès des personnes de confessions protestantes, juives et athées. Le Parlement rechigne à enregistrer l’édit royal et l’assemblée du clergé réprimande de façon solennelle le roi.

Mariage civil

Suite à la Révolution française l’Assemblée législative ordonne que la tenue des registres de naissances, mariages et décès sera dorénavant mise sous la responsabilité des officiers municipaux.

La Constitution de 1791 consacre le mariage civil. Le premier mariage civil a lieu à Sens à la fin du 18e siècle. Mais, de fait, l’Eglise supporte mal la laïcisation des actes de la vie courante. La loi de 1905 impose aux églises de ne pouvoir célébrer un mariage religieux que s’il y a eu, au préalable, mariage civil.

Cette progressive séparation des églises et de l’Etat ne se fait pas sans heurts. Dans les campagnes les instituteurs publics (les Hussards de la République) sont souvent l’objet d’insultes et d’intolérance.

Frère Anne
ne vois-tu rien venir ?

En mars 1906, dans le bourg de Derval, décède M. Anne. Instituteur laïque, pour lequel est organisé un enterrement civil. Le Journal de Châteaubriant affirme « les hautes personnalités de la commune ont tout fait pour empêcher les habitants de le conduire à sa dernière demeure ».

Le Courrier de Châteaubriant (*) note qu’en effet, à part les fonctionnaires des environs, il n’y avait que 5 Dervalais à suivre le cercueil et il ironise : « Je comprends que nos blocards (1) n’en dorment plus. Ils avaient rêvé une superbe manifestation capable d’épater les Dervalais et ceux-ci n’ont répondu qu’avec la plus parfaite indifférence »

Indifférence ? ou intolérance ? Le Courrier explique que les Dervalais « connaissent assez leur religion pour savoir qu’aucun catholique ne peut en conscience assister à un enterrement civil ».

Le même journal ironise encore, au sujet de cet enterrement : « Ce dont vous aviez honte, c’était d’afficher devant la population, le nombre des vingt-cinq enfants qui composent vos deux écoles laïques. Et pour les avoir, ces enfants, il a fallu les envoyer chercher à domicile chez les pauvres fonctionnaires que vous traitez en esclaves ».

« Vos instituteurs laïques auront beau crier que les instituteurs de Derval sont mis à l’index, que le fanatisme catholique fait à l’école laïque une concurrence acharnée, vous n’en aurez pas un enfant de plus ».(...) « Nous voulons que nos enfants aiment Dieu et la France. C’est notre honneur à nous de faire de nos enfants de bons Français et de bons chrétiens, laissez-nous le ».

(*) archives Michel Charron
(1) blocard = partisan du Bloc des Gauches qui a remporté les élections en 1902, après l’affaire Dreyfus.

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