Document 8 : ADLA 43 W 150
30 octobre 1941
Etat nominatif des internés rayés des contrôles du 16 au 29 octobre 1941
Voir documents photographiques :
On notera à partir de MICHELS Charles : "radié définitivement pris comme otage le 22.10.41 par autorité d’occupation"
Archives de Loire Atlantique ADLA 1694 W 39
30 octobre 1941
Rapport mensuel n° 8
Présentation :
Le lundi 20 janvier 1941 à 7 h 30 du matin, un commando d’action directe du parti communiste abat en pleine rue le colonel Hotz, le fedkommandant de Nantes.
Immédiatement, Hitler et le général Von Stuelpnagel, commandant des forces allemandes en France, ordonnent des représailles : 50 otages doivent être fusillés puis à nouveau 50 si les coupables ne sont pas arrêtés avant le 23 octobre à minuit. L’avis paraît dans la presse le 22 octobre 1941, mais les Allemands n’attendent pas cette date pour se faire communiquer les listes des communistes détenus à Châteaubriant, la liste des détenus pour faits de résistance internés à Nantes ainsi que les noms de prisonniers originaires de Loire-Inférieure internés à Paris.
Dès le 20, à la relève de l’après-midi, des feldgendarmes viennent se mettre en position autour de Choisel, ils copient sur les registres une liste de 200 noms, en priorité des détenus de la région, qui est immédiatement envoyée à Paris. De son côté le cabinet du ministre de l’Intérieur français communique aux services allemands une liste de soixante communistes considérés comme les plus dangereux.
Le 22 octobre 1941 à 13 h, le Kreiskommandant de Châteaubriant accompagné d’officiers et de soldats se présente à Choisel avec une liste de 27 hommes qui sont enfermés dans la baraque 6 sous la menace d’une mitrailleuse. Il y a là : 1 député, 3 conseillers généraux, 1 permanent du parti, 4 responsables syndicaux, 2 médecins, 1 dentiste, 5 enseignants, 2 étudiants (Lalet et Moquet, fils de député), 1 ingénieur, 2 imprimeurs, 1 chaudronnier, 1 ouvrier métallurgiste, 1 peintre, 1 marin et 1 employé de préfecture.
Les 27, après avoir écrit une dernière lettre en présence du curé de Béré, (l’abbé Moyon), sont conduits à la sablière située sur la route de Soudan. Le convoi des trois camions dont s’échappent des « Marseillaises » et des « Internationales » ne passe pas inaperçu, surtout un jour de marché.
Le rapport du chef de camp ne revient pas sur les événements eux-mêmes mais il en mesure assez bien les conséquences lorsqu’il fait dire aux intellectuels communistes que « cet événement ne fera que rapprocher et même souder la masse des gens dignes du nom de Français ».
A ce moment là, le 31 octobre 1941, le chef de camp et les détenus savent que les Castelbriantais ont bravé l’interdit allemand et sont allés fleurir les tombes des fusillés placées dans neuf communes des environs et que des fleurs ont même été placées à la Sablière, un geste alors tout naturel : nous sommes à la veille des fêtes de la Toussaint et des Trépassés.
Le rapport parle aussi de l’angoisse des internés politiques qui attendent une nouvelle charrette, ils s’y préparent de la façon la plus digne, la discipline consentie, ainsi que nous l’a déjà dit Fouillien, est le meilleur moyen d’échapper à la panique et la peur. Car la menace d’une nouvelle exécution pèse toujours sur les détenus même si l’ultimatum est repoussé à deux reprises, la seconde fois, le 27 octobre, sine die.
Au comportement des Allemands et particulièrement du Kreiskommandant de Châteaubriant, les autorités françaises et les internés se rendent vite compte qu’ils peuvent à tout moment servir d’otages et le 15 décembre 1941, en représailles d’attentats commis dans la région parisienne. 9 pensionnaires de la baraque 19 sont conduits à l’étang de la Blisière et fusillés. La menace reste permanente jusqu’à la fermeture du camp, 11 autres vont être exécutés à Nantes ou Compiègne.
Quant aux autres catégories d’internés, le chef de camp trouve leur attitude indigne, surtout celle des gens du « milieu » qui - mais il ne nous le dit pas clairement - écrivent aux autorités pour bien rappeler qu’ils n’ont rien à voir avec les politiques. Seuls à nouveau les nomades sont capables de lui soutirer des mots de compassion.
Voici ce rapport d’octobre 1941 Camp de concentration Incidents survenus pendant le mois d’octobreComme le prouvent les punitions infligées au cours du mois, pas d’incident sérieux au camp. Les incidents du 22.10 (compte-rendu adressé le 24) ont beaucoup attaqué le moral d’un certain nombre d’internés "P", toutefois la réaction est toute différente chez les intellectuels. Ceux-ci semblent dire que cet événement ne fera que rapprocher et même souder la masse des gens dignes du nom de Français. Beaucoup paraissent attendre une nouvelle charrette. Ils iront à la mort comme leurs camarades sans faiblesse, sans le concours d’un représentant du culte n’ayant rien à se reprocher. Une minorité accuse le gouvernement d’avoir profité des incidents de Nantes et de Bordeaux pour attaquer et élimioner le parti communiste. Quelques personnes qui semblent être à la tête du parti ont fait l’inventaire de leurs affaires, afin disent-ils d’éviter ce péniblme travail à leurs camarades, pour le cas où ils auraient la même destinée. En résumé les gens sont calmes, patients, résighnés, pas de geste de mauvaise humeur, la discipline au camp est toujours respectée ; cette discipline semble être voulue et libre et consentie ; le mot "silence" a certainement été donné. Chez les indésirables Marché noir : rien à signaler, ces gens ne font que passer au camp pour un laps de temps déterminé, paraissent venir ici en villégiature. Dans le "milieu" : réaction de crainte à la suite des événements, gens indignes d’intérêt, ne pensent qu’à la toilettes et au bien-être. Plaintes relatives au manque de confort, indignation de se voir internés. Tous protestent du faut de n’être pas mieux traités que les autres internés. Nomades Son à mon avis les plus malheureux, sans ressources, ces familles qui d’ordinaire ont pour elles l’espace, souffrent d’être clôturées. Toutefois un certain nombre d’entre eux ayant un domicile fixe, de l’argent et un métier, pourraient à mon sens être l’objet d’une mesure spéciale, et sur présentation d’une quittance de loyer et d’un certificat de domicile, être libérés. 67 d’entre eux ont été loibérés le 8 octobre 1941. L’hiver approche. Les enfant vont nu-pied s, insuiffisamment habillés, [mot illisible] par des parents n’ayant aucune notion de puériculture. Il en résultera vraisemblablement une forte proportion de mortalité chez les moins résistants. Evasion Au cours du transfert de l’indésirable CARON Eugène né le 19 février 1887 à Berthincourt (Pas de Calais) , celui-ci s’est évadé le 8 octobre 1941 à Paris, il devait être conduit à la prison de Pontoise. Etat Sanitaire Dans l’ensemble la situation est satisfaisante. L’infirmerie qui est maintenant en mesure de recevoir une vingtaine de petits malades, héberge actuellement huit internés. Les grands malades (contagieux) sont suivant les ordres de M. le Préfet, dirigés sur l’Hôtel-Dieu de Nantes. Pour chaque hospitalisation, le Commissaire spécial est prévenu par lettre. Places disponibles Politiques femmes : 36 Politiques hommes : 130 Châteaubrtiant le 31 octobre 1941 Courrier envoyé à Robinaut, Commissaire Spécial, service des camps, 2e Bureau, 11 rue Cambacérès Paris Ampliation au Préfet de Loire-Inférieure et au Sous-Préfet de Châteaubriant |