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Poèmes 7

 La Rose et le Réséda

Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats
Lequel montait à l’échelle
Et lequel guettait en bas
Celui qui croyait au ciel ?
Celui qui n’y croyait pas ?
 
Qu’importe comment s’appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l’un fut de la chapelle
Et l’autre s’y dérobât
 
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du coeur des bras
Et tous les deux disaient qu’elle
Vive et qui vivra verra
 
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
 
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Du haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l’un chancelle
L’autre tombe qui mourra ?
Celui qui croyait au ciel ?
Celui qui n’y croyait pas ?
 
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l’autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel ?
Celui qui n’y croyait pas ?
 
Un rebelle est un rebelle
Deux sanglots font un seul glas
Et quand vient l’aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu’aucun des deux ne trompa
 
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat
Il coule il coule il se mêle
À la terre qu’il aima
Pour qu’à la saison nouvelle
Mûrisse un raisin muscat
 
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
L’un court et l’autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L’alouette et l’hirondelle
La rose et le réséda
 
Louis Aragon

 COMPLAINTE DU PARTISAN

Les Allemands étaient chez moi
On m’a dit résigne toi
Mais je n’ai pas pu
Et j’ai repris mon arme.
 
Personne ne m’a demandé
D’où je viens et où je vais
Vous qui le savez
Effacez mon passage.
 
J’ai changé cent fois de nom
J’ai perdu femme et enfants
Mais j’ai tant d’amis
Et j’ai la France entière.
 
Un vieil homme dans un grenier
Pour la nuit nous a cachés
Les Allemands l’ont pris
Il est mort sans surprise.
 
Hier encore nous étions trois
Il ne reste plus que moi
Et je tourne en rond
Dans la prison des frontières.
Le vent souffle sur les tombes
La liberté reviendra
On nous oubliera
 
Nous rentrerons dans l’ombre.
 
Emmanuel d’Astier de La Vigerie

 Ce cœur qui haïssait la guerre

Ce coeur qui haïssait la guerre
voilà qu’il bat pour le combat et la bataille !
 
Ce coeur qui ne battait qu’au rythme des marées,
à celui des saisons,
à celui des heures du jour et de la nuit,
Voilà qu’il se gonfle et qu’il envoie dans les veines
un sang brûlant de salpêtre et de haine.
Et qu’il mène un tel bruit dans la cervelle
que les oreilles en sifflent
Et qu’il n’est pas possible que ce bruit ne se répande pas
dans la ville et la campagne
Comme le son d’une cloche appelant à l’émeute et au combat.
 
Écoutez, je l’entends qui me revient renvoyé par les échos.
Mais non, c’est le bruit d’autres coeurs,
de millions d’autres coeurs
battant comme le mien à travers la France.
 
Ils battent au même rythme pour la même besogne
tous ces coeurs,
Leur bruit est celui de la mer à l’assaut des falaises
Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles
un même mot d’ordre :
Révolte contre Hitler et mort à ses partisans !
 
Pourtant ce coeur haïssait la guerre
et battait au rythme des saisons,
Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères
Et des millions de Francais se préparent dans l’ombre
à la besogne que l’aube proche leur imposera.
 
Car ces coeurs qui haïssaient la guerre
battaient pour la liberté
au rythme même des saisons et des marées,
du jour et de la nuit.
 
Robert Desnos

 N’écris pas mon nom

Claude, si la guerre incertaine
Un de ces beaux matins m’emmène
Les pieds devant,
N’écris pas mon nom sur la terre
Je souhaite que ma poussière
S’envole au vent.
 
Pas d’étendard avec ma chiffe
Que l’officiel et le pontife
Taisent leur bec ;
Vous-mêmes, ce matin d’épreuve,
Mes trois enfants, et toi ma veuve
Gardez l’oeil sec.
 
Pas un regret ne m’importune.
Je suis content de ma fortune.
J’ai bien vécu.
Un homme qui s’est rempli l’âme
De trois enfants et d’une femme
Peut mourir nu.
 
Veux-tu que mon ombre s’égaie
Qu’un canot à double pagaie
Porte mon nom,
Qu’il ait un mât, voile latine,
Le nez léger, l’humeur marine
Et le flanc blond.
 
Tu sais comment j’aimais la vie.
Je détestais la jalousie
Et le tourment.
Si les morts ont droit aux étrennes
Je veux qu’au bout de l’an tu prennes
Un autre amant.
 
Jean Prévôt (en mer, 12 juin 1940)
tiré de "derniers poèmes" aux éditions Gallimard

 

Au pied du Monument érigé en souvenir des martyrs de la Sablière, des alvéoles contiennent de la lieux d’exécution et de torture.

 Terres de Châteaubriant

Terres de Châteaubriant
Terres du sacrifice
Venues des quatre coins de France
Venues d’ailleurs et de lointains parages
 
Terres du désespoir et du combat
Terres indomptables du courage
Terres des barbelés
Cendres des crématoires
Poignées de terre prises à des montagnes de souffance
 
Humus des fosses
Terres des longs charniers
Terres de la terreur
Terres d’atrocités
 
Terres des geôles
Terres des citadelles
Chambres de tortures où se déchaîne le mal
 
Monument où parlent en silence
Toutes des bouches de terre
Fontaines intarissables
D’un indomptable résistance
 
Géographie sanglante
où tous les sangs se mêlent
Et toutes les saisons et tous les paysages
 
Ce sable a bu le sang des combattants de l’ombre
Cette glaise a recueilli les corps martyrisés
Ces cailloux réclament sans fin justice
 
Terres de Châteaubriant
Bouches de silence
Lèvres de fierté
 
Hommes et femmes veillez
Sentinelles de l’espérance
 
Car toute espérance se survit


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Texte du livre "Telles furent nos jeunes annees", telechargeable ici : http://www.journal-la-mee.fr/IMG/pdf/LivreMee.pdf

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