Marchande de cheveux
10 janvier 1856 - Julienne Brossays, d’Erbray, marchande de cheveux, a placé en nourrice à Châteaubriant, chez Victorien Begard, un fils né le 21 juin 1855 avec promesse de payer 10 frs par mois. Mais elle a quitté le pays, abandonnant son enfant : « une lettre du 21 décembre 1855 ne laisse aucun doute à cet égard. » écrit le maire.
Le sieur Victorien Begard, ne veut plus, « maintenant qu’il est désabusé sur son compte » garder plus longtemps l’enfant de cette malheureuse. D’ailleurs il est loin d’en avoir les moyens. Le maire demande au Sous-Préfet de faire admettre le jeune Alexandre au nombre des enfants abandonnés du Département.
13 janvier 1856 - Le Conseil Municipal se réunit sous la Présidence de M. Béchu du Moulin Roul. Il accepte d’abord le legs fait par M. le docteur Jean-Baptiste Ernoul Provôté, qui, par suite de son testament olographe du 13 mars 1846, lègue 500 frs à l’école communale, 1000 frs à
l’hospice de Châteaubriant, 500 frs au bureau de bienfaisance et 500 frs à la salle d’asile.
Justice de paix
13 janvier 1856 - la maison communale située rue de Couëré est re-donnée à bail à M. Salmon dans les mêmes conditions que précédemment.
La Justice de Paix aura désormais un local au Château, et par suite la commune pourra disposer du local qui lui était affecté. Le Conseil Municipal vote l’achat de ce qui manque au mobilier de la Justice de Paix.
7 février 1856 - le maire transmet au Sous-Préfet le procès-verbal d’enquête commodo et incommodo relatif à l’établissement d’une machine à vapeur, de la force d’un cheval, pour faire marcher le ventilateur de la fonderie des sieurs Franco et Gurzinski.
15 février 1856 - La mairie a l’intention d’acquérir « une belle horloge sonnant les heures et les demies pour l’installer à l’Hôtel de Ville ». Le timbre est déjà posé dans le campanile édifié à cet effet.
Le maire demande un devis à un ingénieur mécanicien.
22 février 1856 - le Conseil Municipal de Châteaubriant se réunit sous la présidence de M. Delourmel, maire. Le plan de la pompe à établir place St Nicolas est présenté aux Conseillers. Un crédit de 1500 frs était prévu. Le maire demande et obtient 123,10 frs de plus.
M. l’instituteur-adjoint sollicite une augmentation de son traitement : accord du Conseil Municipal pour lui accorder 400 frs par an (au lieu de 300) à compter du 1er janvier 1856 « eu égard à la cherté des subsistances ».
6 mars 1856 - le maire se renseigne sur un certain Antoine Ceberet, qui s’est marié à Châteaubriant puis est allé résider à Basse-Terre en Guadeloupe « où il doit être employé au bureau de police »
« Depuis le 20 février 1853 on n‘a plus entendu parler de lui. Cependant il serait urgent de savoir ce qu’il est devenu, par la raison que sa femme est morte et que de leur mariage il existe un enfant auquel il convient de nommer un tuteur et un subrogé tuteur ».
Loulou chez les Zoulous
16 mars 1856 - L’impératrice Eugénie donne le jour à Eugène-Louis-Napoléon qui sera le fils unique du couple impérial.
Le Conseil Municipal de Châteaubriant écrit :
Sire
« Par la sagesse de votre gouvernement vous avez assuré l’ordre, fait revivre l’agriculture, le commerce et l’industrie. Avec une grande fermeté de caractère vous avez entrepris une guerre nécessaire et glorieuse. Aujourd’hui vous préparez la paix à l’Europe et vous appelez toute la France à la Concorde.
Dans notre respectueuse reconnaissance, nous venons féliciter Votre Majesté de la naissance d’un fils que la Providence semble vous avoir accordé pour qu’il ne manquât rien à votre bonheur et à votre avenir. »
Le jeune homme, que ses parents appelaient Loulou, représentait l’espoir d’une dynastie. Après la proclamation de la République le 4 septembre 1870, le prince impérial se réfugiera en Belgique puis passera en Angleterre pour rejoindre sa mère l’impératrice Eugénie.
Le prince s’engagera dans l’armée britannique. Envoyé en Afrique du Sud, il sera tué après une résistance qualifiée d’héroïque en 1879 en plein pays Zoulou.
24 mars 1856 - le maire de Châteaubriant signale au Ministre de la Marine que le jeune Louis Duchesne, marin, de la commune de Fercé, n’a point écrit à sa famille depuis le 24 avril 1854. Il était alors à Odessa (Russie). La famille désirerait savoir ce qu’il est devenu.
Un mois plus tard on apprendra qu’il a quitté le « Henri IV » le 1er février 1855 et qu’il est passé sur la Corvette à vapeur « le véloce » à Toulon .
16 avril 1856 - Déclaration internationale interdisant la Course (c’est-à-dire la piraterie officielle). La France, le Royaume-Uni, la Russie, la Prusse, l’Autriche, la Sardaigne et la Turquie, réunis à Paris, signent une déclaration d’abolition de la « course en mer » (corsaires).
5 mai 1856 : un détachement de 70 jeunes soldats a pris gîte dans la commune de Châteaubriant, le 26 avril 1856. Le Maire promet de faire en sorte que le boulanger soit payé.
Un autre régiment de 110 hommes était prévu mais n’est pas passé. Le boulanger a fait du pain pour rien . « Ce pain étant fabriqué par pains de un kg et demi, et cette forme étant peu convenable à la vente », le boulanger demande que l’administration prenne les mesures nécessaires pour l’en débarrasser. « Ce contretemps est fâcheux et il était facile de l’éviter par l’envoi d’un avis contraire » dit le maire. (ndlr : une note du 10 mai précise que le pain a été vendu au profit du Trésor).
Hydrocéphalie
6 mai 1856 - « il n’est parvenu dans la commune de Châteaubriant aucun cas d’hydrocéphalie pendant l’année 1855 ».
Mais pourquoi cet intérêt soudain pour l’hydrocéphalie ? Est-ce parce que, F.Engels, dix ans plus tôt, a décrit les conditions de vie de la classe ouvrière en Angleterre et signalé que, en ville « les décès dus à l’hydrocéphalie sont trois fois plus nombreux » qu’à la campagne ?
« La façon dont la société actuelle traite la grande masse des pauvres est véritablement révoltante ».
« On les attire dans les grandes villes où ils respirent une atmosphère bien plus mauvaise que dans leur campagne natale. On leur assigne des quartiers dont la construction rend l’aération bien plus difficile que partout ailleurs. On leur ôte tout moyen de rester propres, on les prive d’eau en ne leur installant l’eau courante que contre paiement, et en polluant tellement les cours d’eau, qu’on ne saurait s’y laver ; on les contraint à jeter tous les détritus et ordures, toutes les eaux sales, souvent même tous les immondices et excréments nauséabonds dans la rue, en les privant de tout moyen de s’en débarrasser autrement ; et on les contraint ainsi à empester leurs propres quartiers » écrit Engels en 1845.
« Mais ce n’est pas tout. On accumule sur eux tous les maux possibles et imaginables (...). On les expose aux émotions les plus vives, aux plus violentes alternatives de crainte et d’espoir ; on les traque comme du gibier et on ne leur accorde jamais de repos, pas plus qu’on ne les laisse tranquillement jouir de l’existence. On les prive de tout plaisir, hormis le plaisir sexuel et la boisson, mais on les fait travailler chaque jour en revanche jusqu’à épuisement total de toutes leurs forces physiques et morales, les poussant ainsi aux pires excès dans les deux seuls plaisirs qui leur restent ».
« Et si cela ne suffit pas, s’ils résistent à tout cela, ils sont victimes d’une crise qui en fait des chômeurs et qui leur ôte le peu qu’on leur avait laissé jusqu’alors ».
« Comment serait-il possible dans ces conditions que la classe pauvre jouisse d’une bonne santé et vive longtemps ? Que peut-on attendre d’autre qu’une énorme mortalité, des épidémies permanentes, un affaiblissement progressif et inéluctable de la génération des travailleurs ? » (texte de F. Engels)
Source : http://www.marxists.org/francais/en...
27 mai 1856 - Le Conseil Municipal se réunit sous la présidence de M. Delourmel, maire. Il adopte à l’unanimité un vœu concernant le chemin de Soulvache à Châteaubriant par Fercé :
« Considérant combien il est important, dans l’intérêt du commerce et pour les approvisionnements de la ville, d’établir des communications faciles entre Châteaubriant et les pays voisins, le Conseil sollicite la prompte exécution de ce chemin ».
« Ce chemin traverse un large territoire populeux et fertile, dont les habitants, faute de voie praticable, désertent le marché de Châteaubriant pour fréquenter dans un département voisin, celui de Martigné. Ils y font leurs ventes et leurs achats au grand détriment du chef-lieu de l’arrondissement ».
« Le Conseil demande que le chemin dont il s’agit, au lieu d’aboutir à la Trinité, dans un faubourg sinueux et étroit, déjà chargé de la circulation de deux grandes routes, celles de Rennes et de Bain, soit dirigé sur les halles par une ligne prenant à la métairie de la Borderie, appartenant à la famille de la Pilorgerie, et passant auprès du Moulin à vent de M. Gendry » [Il s’agit du Moulin à Vent de Choisel].
« Ce sera embellir la ville, créer un nouveau faubourg et donner à la halle d’autres débouchés dont les besoins se font de plus en plus sentir ».
[ndlr : cette route sera effectivement réalisée, elle s’appelle, de nos jours, la rue Guy Môquet et va, tout droit, de la Borderie à la Halle devenue mairie].
30 mai 1856 - Le Conseil Municipal examine les comptes de 1855. On y note :
La taxe sur les chiens a rapporté 1039,50 frs
Pour l’horloge : 2500 frs
Salaire d’un cantonnier communal : 400 frs
Secours à la victime d’un incendie : 20 frs
Pour le budget 1857 :
Traitements :
Secrétaire de mairie : 800 frs
Commissaire de police :1000 frs
Instituteurs (pour les deux) :1130 frs
Cantonnier : 400 frs
Tambour : 80 frs
[ndlr : rapport au budget de 1855, on note que le traitement du secrétaire de mairie est resté le même, En revanche le traitement du commissaire de police, qui était de 600 frs est proposé à 1000 frs, et le salaire du maître et du sous-maître de l’école, qui était de 800 frs est proposé à 1130 frs - voir au 4 juin 1854].
Achat d’un jardin : M. Joseph Lesage, procureur impérial, a mis en vente sa propriété, située sous les murs nord du château. Le maire souhaite acheter la partie nécessaire pour donner abord à la Promenade des Terrasses, près le Moulin de la Torche. Il propose 3000 frs. M. Lesage en veut 3500.
Des conseillers trouvent ce prix trop élevé. M. Bossé dit par exemple que, pour cette somme, on aurait des terrains « autrement vastes et créant un plus grand avenir » du côté des Halles.
M. Béchu fait observer qu’indépendamment de l’acquisition du complément de la Promenade, il restera en caisse des fonds suffisants pour l’ouverture du Faubourg des Halles.
M. Pasquier dit qu’il est de l’intérêt de la ville d’acheter le terrain Lesage, « sinon on le regretterait ».
Finalement le Conseil Municipal autorise l’acquisition à 3500 frs et met 4000 frs au budget. [On apprendra, le 19 juillet 1856, que ce terrain est estimé à 3516,10 frs]
Horloge : à propos de l’horloge qui doit être placée à l’hôtel de ville, les devis sont de :
2300 frs pour une horloge à quarts
1700 frs pour une horloge à demi-heu-res seulement
Des Conseillers font observer qu’une seule horloge publique est nécessaire à Châteaubriant - qu’elle devrait être placée dans un édifice élevé et convenablement situé pour être entendu de toute la ville - qu’il serait encore temps de faire cette dépense quand l’horloge qui existe dans la tour de l’église ne pourrait plus utilement fonctionner.
D’autres disent que l’horloge actuelle est très irrégulière - qu’un timbre est déjà placé à l’hôtel de ville - qu’il convient de l’utiliser en mettant une horloge qui rendrait de grands services.
Finalement le Conseil Municipal retient une horloge à quarts et inscrit 2500 frs à son budget.
Respectueuse déférence
30 mai 1856 - Au sujet des Pompiers, le maire rappelle que, le 24 mai 1855, il a été dit qu’aucune dépense ne doit être faite sans autorisation préalable. « Mais malgré le blâme, M. Legal, capitaine des pompiers, s’est permis d’acheter sans autorisation des objets, inutiles pour la plupart, dont le prix total s’élève à 208,90 frs. Cette manière d’agir ne peut être tolérée et je vous engage à ne pas admettre ce mémoire ». Pas content, le maire !
M. Béchu fait alors observer qu’une lettre de M. Legal, en date du 10 mai 1855, demandait l’allocation des fonds nécessaires pour acheter divers objets utiles pour le service des pompiers en cas de sinistre.
Du coup, le Conseil Municipal souhaite voir cette lettre : « Elle est le fondement de l’affaire et témoigne sans doute de la respectueuse déférence de M. Legal pour le Conseil dont il demande l’autorisation. Faute de cette lettre il y aurait lieu de l’entendre avant de le condamner ». M. Béchu engage l’assemblée à user d’indulgente bienveillance envers M. Legal, chef d’un corps appelé à rendre de grands services.
Le Conseil Municipal rejette la facture globale mais en accepte cependant une partie : achat de 50 seaux pour 134,40 frs.
8 juin 1856 - Le Conseil Municipal se réunit pour voter un secours de 200 frs « en faveur des inondés ».
[ndlr : En effet, cette année-là, à la fin mai, de fortes averses ont provoqué des inondations destructrices sur les deux-tiers du territoire français : sur les bassins de la Loire, du Rhône et dans une moindre mesure sur ceux de la Garonne et de la Seine. Si les pertes humaines furent très limitées, en revanche les espaces urbains ainsi que nombre d’infrastructures, sans oublier les biens ou espaces agricoles des territoires concernés, furent lourdement affectés.
Les inondations de 1856 furent à l’origine d’un important programme de travaux de défense des villes (loi du 28 mai 1858) réalisé au cours de la décennie suivante. Ces événements donnèrent également une impulsion décisive au développement de réseaux locaux de surveillance des cours d’eau et à l’annonce des crues en France].
Un gaz méphitique
9 juin 1856 - l’arrêté du Préfet concernant le règlement des eaux de l’Etang de la Torche et du Bassin de Couëré n’a été exécuté que pour le Bassin de la Torche.
Tous les habitants de Couëré sont venus se plaindre de ce que le meunier, qui ne voulait pas moudre le dimanche, avait levé toutes les vannes du bassin et laissé la rivière à sec.
Le maire écrit au Sous-Préfet : « Vous savez que c’est là que se rendent toutes les eaux et les immondices de la ville. Le soleil dardant sur le fond de la rivière a développé un gaz méphitique qui empeste le quartier. Si j’avais eu un commissaire de police j’aurais fait baisser les vannes pour cause de salubrité ».
« Cependant Artur aurait pu alléguer que, le forçant à tenir les vannes baissées, il risquait un procès si les rues voisines étaient inondées ».
« Pour faire cesser cet état de choses, ayez la bonté de prier M. le Préfet de faire exécuter son arrêté dans son entier. Lorsqu’un déversoir sera établi de chaque côté des vannes l’on ne pourra plus alléguer la crainte d’inonder les maisons voisines en laissant les vannes baissées ».
« Vous connaissez le mauvais vouloir du meunier » ajoute le maire, « il se fera un malin plaisir à laisser dégager un gaz méphitique et insalubre toutes les fois qu’il n’en éprouvera aucun dommage ».
« Je vous prierai de bien vouloir rappeler à Monsieur le Préfet que nous n’avons pas de commissaire de police ». [Tiens donc, c’est pour cela que le Conseil Municipal a prévu une augmentation importante de son traitement ?]
10 juin 1856 - Le Préfet a autorisé MM. Franco et Gurzincski à établir une fonderie à Châteaubriant. Le maire communique la bonne nouvelle aux deux entrepreneurs. Il est précisé qu’il s’agira d’un « fourneau à la Wilkinson ».
[ndlr : ceci correspond à un tournant de l’industrie métallurgique. En Fonderie, le Four Wilkinson était un four à cuve où l’on refondait ensemble plusieurs qualités de fonte mêlées à divers débris de métal.
C’est Réaumur qui, en 1722, popularisa ce genre de four, sous le nom de Four à manche. Et c’est Wilkinson qui déposa un brevet en 1794 pour un grand four fixe à cuve. Le Four Wilkinson est l’ancêtre du Cubilot, qui sortit après 1860. A cette époque un tiers de la fonte française est encore produite dans des hauts-fourneaux à charbon de bois. Mais le coke supplantera le charbon de bois .......
Un Cubilot est un four de seconde fusion. Le chargement se fait par le gueulard, situé en haut de l’appareil. Il est constitué de couches successives de coke, de castine et de fonte. La fusion est activée par une boîte à vent distribuant de l’air chaud en plusieurs points. Le métal liquide est tiré en bas du cubilot et versé dans des "poches" en tôle équipées d’un garnissage réfractaire.]
La promesse d’un Chemin de fer
11 juin 1856 - Napoléon III passe à Châteaubriant . Le maire, à la tête du Conseil Municipal, remet à sa Majesté une pétition demandant un chemin de fer de Nantes à Laval.
L’Empereur, qui visitait lui-même les inondations de la Loire, est obligé de laisser derrière lui « le chemin de fer d’Orléans à Nantes, envahi par les eaux, coupé en plusieurs endroits », et ne peut rentrer à Paris « qu’en suivant la grande route de Nantes à Laval par Châteaubriant. ».
Il traverse alors le pays de Châteaubriant « grand producteur de graines et de bétail, couvert de bois et de forêts, contenant d’inépuisables minerais de fer, des forges, des mines de houille, des bancs calcaires largement exploités et des ardoisières rivales de celles d’Angers »
Aussi, sur son parcours, « l’Em-pereur dit aux populations accourues pour saluer Sa Majesté : vous avez besoin d’un chemin de fer, il vous sera accordé ».
25 juillet 1856 - Le Préfet de Loire-Inférieure adresse un mandat de 1000 frs pris dans les fonds de secours attribués par l’Etat, à titre de subvention d’utilité communale. Le Maire précise qu’elle sera utilisée pour des travaux de charité.
13 août 1856 - Le maire de Rennes a lancé une « lotterie ». Six personnes de Châteaubriant ont pris 22 billets à un franc [ce qui correspond à peu près à une demi-journée de travail d’un ouvrier] :
Le maire
Le receveur entrepreneur des tabacs
Le percepteur receveur municipal
Le secrétaire de mairie
Un médecin
Et une autre personne.
Le Maire est Béchu
31 août 1856 - M. Delourmel est démissionnaire du poste de Maire. Un décret impérial du 28 juillet 1856 désigne M. Hippolite Béchu du Moulin Roul pour le remplacer. Le Sous-Préfet prononce une allocution à cette occasion :
[Faut-il la lire entre les lignes ?]
Messieurs,
« La satisfaction que j’éprouve aujourd’hui à installer une administration municipale animée à la fois de l’esprit d’ordre, de conciliation et de progrès, ne me fait pas oublier les services rendus par le magistrat ferme et consciencieux qui s’est volontairement éloigné des affaires après avoir défendu les intérêts de votre ville avec un rare dévouement. L’ingratitude peut quelquefois exister chez les particuliers et dans certaines circonstances elle est excusable, mais dans les relations publiques elle est une mauvaise conseillère en toute occasion »
« Je croirais donc manquer à mes devoirs en ne rappelant pas le concours énergique qui nous a été prêté après les événements de décembre par l’honorable M. Delourmel et cela dans des moments souvent pénibles, toujours difficiles »
« Plus tard, quand M. Delourmel eut vu le gouvernement de l’Empereur rallier tous les esprits à une nouvelle politique par des actes empreints d’un véritable patriotisme et d’un amour sincère des classes laborieuses, il chercha alors à seconder, dans les limites de son action, la généreuse initiative du chef de l’Etat ».
« N’oublions jamais, messieurs, que la ville de Châteaubriant doit à M. Delourmel l’importante amélioration de la taxe actuelle du pain, en même temps que celle du lit de la Rivière de Chère. Et enfin cette excellente pensée de l’acquisition du Château par le Département qui importait tant à l’avenir et à la prospérité de votre cité. »
« M. Delourmel a voulu se retirer quand il était libre de rester plus longtemps à la tête de l’administration municipale. C’est alors que l’honorable M. Béchu a bien voulu accepter une succession que, bien loin de rechercher, il n’a accueillie qu’avec des hésitations qui donnent encore plus de prix à son concours. Je croirais blesser la modestie de M. Béchu en faisant ici son éloge qui serait, du reste, inutile dans un pareil lieu, écho de sa parole toujours bienveillante, de son langage empreint de sagesse et de modération ».
« L’administration municipale confiée en de bonnes mains ne périclitera pas et l’union qui ne peut manquer d’exister entre M. Béchu et vous, lui permettra de poursuivre sans relâche la voie des améliorations pratiques et mûries par l’expérience et le temps ».
« Il aura pour le seconder dans sa tâche de tous les jours, deux hommes à l’esprit droit et généreux et choisis parmi vous, qui étaient dignes de s’associer parce qu’ils étaient faits pour s’estimer et se comprendre ».
« Dans de pareilles conditions on peut entrevoir désormais un avenir calme et prospère pour le chef-lieu de l’arrondissement. Que toutes les divisions, messieurs, soient oubliées pour faire place à la concorde et n’ayons plus qu’un seul et même drapeau, celui qui naguère flottait si haut sur les rives de la Baltique et sur les côtes de la Mer Noire ».
« Le bien ne se produit jamais sans quelques sacrifices. Que chacun de son côté apporte un peu du sien. En ce qui me concerne, je serai toujours le premier, comme représentant de l’Etat, à donner l’exemple, auquel je sais que vous voudrez toujours répondre, lorsque les concessions qu’on vous demandera, ne toucheront pas à votre dignité et à la liberté de vos délibérations ».
« Je considère d’ailleurs comme une preuve des bons sentiments qui animent le Conseil Municipal de Châteaubriant, le concours qui nous a été gracieusement prêté par l’honorable M. Guimené en l’absence de M. Béchu. En agissant ainsi, cet aimable citoyen, si justement considéré parmi vous, nous a lié par la reconnaissance, sentiment que nous sommes heureux d’éprouver car il est le signe d’une entente qui présage à la nouvelle administration une existence paisible et régulière sans laquelle le bien serait difficilement accompli. »
[ndlr : à la lecture de ce beau discours, on se demande s’il n’y a pas lieu de lire entre les lignes. Rappelons que le Conseil Municipal de Châteaubriant a été révoqué le 8 décembre 1851, six jours après le coup d’Etat du 2 décembre. C’est alors M. Delourmel qui a pris la responsabilité de l’action municipale, sans avoir le titre de maire. Il n’a été nommé Maire que le 28 mai 1854, cependant que M. Béchu était nommé adjoint avec voix consultative !
Y avait-il une bonne entente au Conseil Municipal ? On peut en douter à voir comment, dans son discours, le Sous-Préfet fait appel à l’union, à l’absence de division, aux sacrifices, aux concessions ...
Il est possible que M. Delourmel, lassé des tensions et d’une certaine suspicion de l’Etat, ait préféré passer la main. Mais ce ne sont que des suppositions : le cahier officiel du Conseil Municipal ne s’étend quasiment pas sur les dissensions internes quand elles n’ont pas de répercussions sur la vie municipale. ].
Le Sous-Préfet installe donc :
Maire : Hippolite Béchu du Moulin Roul
Adjoints :
-
- Henri Picot de Plédran
- Victor-Florent Prod’homme
(M. Guibourg, qui était adjoint précédemment, est nommé Juge de Paix)
Le maire et les deux adjoints prêtent individuellement serment de fidélité à l’Empereur et d’obéissance à la Constitution.
Vieilles Halles
31 août 1856 - Au cours du même Conseil Municipal, sous la présidence de M. Béchu, celui-ci donne lecture d’une pétition demandant la démolition des vieilles halles de Châteaubriant.
Plusieurs membres proposent l’acquisition, par la ville, des maisons des héritiers Thuau et Boutruche, contiguës à l’emplacement des vieilles halles, « emplacement trop exigu pour le marché qui s’y tient »
D’autres membres demandent que l’on transporte, sur la place des halles neuves, le marché à la volaille, au beurre et aux œufs, en laissant seulement aux vieilles halles le marché aux poissons et aux légumes.
Au même Conseil, des personnes demandent un abattoir à Châteaubriant. D’autres voudraient que soit placée une pompe au puits de la Place de la Pompe. Une commission de cinq membres est nommée pour étudier ces demandes.
Un arrêté préfectoral autorise la commune à recevoir les 500 frs légués par M. Jean Baptiste Ernoul Provôté à l’école publique, mais indique cette que somme devra être employée à l’achat de rentes sur l’Etat. Or les bâtiments de cette école ont besoin de réparations : le Conseil Municipal sollicite donc l’autorisation de faire servir cette somme de 500 frs aux travaux de réparation.
[ndlr : on notera l’apparition de l’expression Ecole Publique, alors qu’on parlait jusqu’à maintenant de Ecole Communale].
Garde en bandoulière
31 août 1856 - Le Conseil Municipal fixe à 600 frs le traitement annuel du Garde Champêtre et décide que cet agent portera une bandoulière aux armes de la ville avec l’indication de sa qualité.
Le Conseil autorise les réparations nécessaires à la Fontaine Saint Jean de Béré, au lavoir du même nom, au lavoir des Planches et à celui du chemin des « Mâres » (sic !) pour un total de 350 frs.
M. le maire expose qu’il est urgent de réparer le pavé de la rue du Couëré sur une longueur de 60 m à partir du Pont St jean (dépense évaluée à 3200 frs dans laquelle entrera la somme de 800 frs votée pour réparation du pavé de la ville).
Enfin la location du grenier de la Halle au Blé ayant été tentée sans succès par voie d’adjudication, le Conseil Municipal autorise le maire à faire une location de gré à gré.
Victor Hugo : les contemplationsEn 1856 paraît le recueil poétique le plus important de Victor Hugo. Il comporte deux parties : « Autrefois, Aujourd’hui ». « Un abîme les sépare : le tombeau ». Au centre se trouve la date du 4 septembre 1843 : la mort de Léopoldine, fille de Victor Hugo. Il s’agit d’un miroir tendu au lecteur : « ceux qui s’y pencheront retrouveront leur propre image dans cette eau profonde et triste, qui s’est lentement amassée là, au fond d’une âme » écrit-il dans la préface du livre. Des poèmes sur l’adolescence ... : Rose, droite sur ses hanches Leva son beau bras tremblant Pour prendre une mûre aux branches ; Je ne vis pas son bras blanc. Des poèmes sur l’enfance malheureuse au XIXe siècle : Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ? Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ? Ils s’en vont travailler quinze heures sous des meules ; Ils vont, de l’aube au soir faire éternellement Dans la même prison le même mouvement (...) Que ce travail, haï des mères soit maudit ! Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit, Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème ! O Dieu ! Qu’il soit maudit au nom du travail même ; Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux, Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux ! Les Contemplations, dans toute sa beauté, est le livre d’un mort : Maintenant, je veux qu’on me laisse ! J’ai fini ! Le sort est vainqueur. Que vient-on rallumer sans cesse Dans l’ombre qui m’emplit le cœur ? Victor Hugo : où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ? |