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1834



4 janvier 1834 : le Conseil Muni-cipal entend ce qui a été fait pour parvenir à la classification de son territoire, et à l’évaluation proportionnelle du revenu imposable des diverses natures de culture.

Par exemple, les terres labourables sont réparties en 5 classes :
- Les landes ....................4 classes
- Les bois de sapin ...........1 classe
- Les étangs, viviers, réservoirs, abreuvoirs, fontaines et mares.....1 classe
- Les sablières ..................1 classe

Le Conseil fixe le revenu moyen des parcelles choisies pour étalon, dans chaque classe, en fixant les prix :
- du journal (mesure ducale valant un demi-hectare)
- de l’hectare

Les divers moulins sont aussi évalués. Il y a quatre moulins à eau à :

Rigale 180 francs
Choisel 160 francs
Couëré 140 francs
Bois-Briant 140 francs

Et quatre moulins à vent dont deux à La Garenne :

Béré 66 francs
La Garenne 66 francs
La Garenne 50 francs
Choisel 40 francs

Enfin 24 maisons et 13 métairies sont évaluées. De nos jours on parlerait de « revenu cadastral ».

Février 1834 : à Lyon, mécontents de la baisse des salaires dans l’industrie, les ouvriers constitués en « mutuelles » manifestent et se mettent en grève. Le gouvernement dépose un projet de loi jugé « liberticide » puisqu’il interdit les associations divisées en sections de moins de 20 personnes et les menace des tribunaux correctionnels. À Paris, les mutualistes et les membres des Droits de l’Homme manifestent, disant qu’ils répondront à la suspension de la liberté par la suspension de l’ordre. Châteaubriant, qui est exclusivement rurale, est loin de cette agitation et le cahier des délibérations municipales n’en fait aucun écho.

26 février 1834 : le gouverneur général d’Algérie, Drouet d’Erlon, fait reconnaître la suzeraineté française par un nouveau chef arabe, Abd-el-Kader, qui obtient en échange le libre commerce des poudres et des armes.

11 mars 1834 : l’horloge na pas été livrée à Châteaubriant au 1er mars 1834 comme promis. Mais cela ne saurait tarder, pense le maire, qui écrit au directeur de l’école royale des Arts et Métiers d’Angers : « Il me paraît très urgent que quelqu’un de votre part vienne ici pour faire l’examen des lieux et prendre toutes les mesures, car la plus petite omission nous mettrait dans l’embarras et occasionnerait nécessairement encore du retard »... pour la livraison de l’horloge.

 Le massacre

9-14 avril 1834 : à Lyon, la bataille entre les ouvriers et le service d’ordre fait 301 victimes : 170 insurgés et 131 hommes de troupe. 17000 coups de canon ont été tirés, plusieurs ponts sur la Saône sont incendiés par des bateaux-brûlots chargés de foin, l’église des Cordeliers est éventrée par les soldats. Les Parisiens s’émeuvent. Le gouvernement interdit le journal La Tribune. Le 13 avril tout le quartier du Marais se couvre de barricades. Le gouvernement envoie les troupes de Bugeaud, 40 000 hommes, 36 pièces d’artillerie. Rue Transnonain, les soldats excités se ruent dans l’immeuble du numéro 12 et en massacrent les habitants, des innocents qui n’ont même pas pris part au combat.

2000 insurgés sont arrêtés et déférés devant la Cour des Pairs.

 Avec un concierge plus intelligent ...


22 avril 1834
 : il y a un conflit entre la mairie et la prison de Châteaubriant. Le maire écrit au Procureur du Roi : « Je ne sais si je m’abuse mais certaines explications entortillées et pour moi fort inintelligibles qui m’ont été données hier par le concierge de la Maison d’Arrêt, me porteraient à croire que les ordres qu’il a reçus de moi, pour interdire toute communication avec les prisonniers, auraient été de sa part involontairement sans doute, l’objet de certain quiproquo dont je n’entends nullement prendre la responsabilité.

Par exemple, cette réflexion qu’il me fit à diverses reprises de ne pouvoir empêcher ni le Procureur du Roi ni Monsieur le Substitut, ni Monsieur le Juge d’instruction, de communiquer avec les prisonniers, m’a témoigné combien il avait mal compris une défense qui n’était pas la conséquence de mon adhésion empressée au désir que m’avait exprimé M. Orianne [juge d’instruction] de n’accorder aucune permission pour pénétrer dans la prison sous quelque prétexte que ce soit (c’est souligné dans la lettre).

Je ne conçois pas que le concierge ait pu comprendre que j’aye la prétention ridicule d’étendre cette interdiction à des magistrats dont les fonctions nécessitent des rapports fréquents avec les prisonniers, pas plus que je n’ai entendu que les mêmes magistrats ne peuvent se faire accompagner de qui bon leur semblerait et permettre en leur présence telle communication par eux jugée nécessaire et sans danger »

 Que vous voulussiez ...

« Cependant comme j’ai déjà eu précédemment l’honneur de vous l’écrire le 14 août dernier, pour que le plus grand ensemble régnât dans les mesures de précaution et de police, il conviendrait que vous voulussiez bien, Monsieur le Procureur du Roi, me faire connaître officiellement les noms des détenus avec lesquels les communications devraient pendant un temps ou déterminé ou indéterminé, être suspendues. Et j’ajouterai que ce moyen serait le seul propre à éviter ces contradictions apparentes qui semblent régner entre les mesures de l’autorité municipale que l’on chargerait de l’odieux d’un refus qu’elle ne fait subir aux parents et amis des détenus que dans l’intérêt de la patrie et celles que l’autorité judiciaire croirait de sa part suivre isolément »

« Avec un concierge plus intelligent, ou de meilleure volonté, l’autorité que j’ai l’honneur de représenter n’aurait aucun besoin de telles explications mais puisque celui-ci ne comprend pas ou feint de ne pas comprendre ce qu’on lui dit clairement, j’ai jugé utile de vous les adresser ».

30 avril 1834 : Lamennais publie « Les paroles d’un croyant », véritable pamphlet révolutionnaire. « C’est la Marseillaise du christianisme » écrit-on « et l’auteur est un prêtre en bonnet rouge ». Le pape, par l’encyclique "Singulari vos", condamnera cet ouvrage quelques semaines plus tard.

20 mai 1834 : à Châteaubriant on est très loin de cette agitation. Au Conseil Municipal, ce jour-là, il y a discussion animée à propos de la cour de l’hôtel du Boisdulier (*) dont le portail donne sur la rue de Couëré. Les Conseillers ne sont pas d’accord et quatre opinions différentes s’expriment :
- La cour est privative au « presbitère »
- La cour a toujours été commune et doit continuer à l’être
- Le « presbitère » n’a qu’un droit de passage
- La cour est privative aux appartements occupés par les locataires Mme veuve Gautron et M. Bauduz

Finalement, on vote et par 12 voix contre 7 le Conseil décide que la cour est commune au « presbitère » et aux appartements Gautron et Bauduz.

24 mai 1834 : le maire écrit à Monsieur le commandant de la Garde Nationale : « La prestation de serment de MM. les Officiers de la Garde Nationale nouvellement élus aura lieu le dimanche 25 mai 1834 aux trois heures précises du soir, sur la promenade dite du Bout du Monde de cette ville ». (l’expression est soulignée dans le texte. C’est la première fois qu’on voit apparaître cette appellation : le Bout du Monde).

« Veuillez bien, Monsieur le Capitaine, assurer mes anciens compagnons d’armes de l’exactitude que j’apporterai à me rendre au milieu d’eux, heureux et satisfait de les voir réunis de nouveau autour de nos brillantes et glorieuses couleurs nationales qui seront toujours l’effroi des ennemis de la patrie et le signe de ralliement des amis de la Liberté, de l’Ordre public, dans la bonne comme dans la mauvaise fortune ». (Félix Lebreton fut en effet commandant de la Garde Nationale, revoir au 16 septembre 1831)

25 mai 1834 : le Conseil Municipal est prévu pour 2 heures du soir, mais à 3 heures il n’y a pas assez de conseillers. Il est donc reporté.

29 mai 1834 : les comptes de l’année 1832 sont arrêtés et on discute du budget de 1835.

Le maire estime que les travaux dont est chargé le secrétaire de mairie sont tellement multipliés qu’il lui est impossible de les exécuter pendant les heures de bureau, et qu’il est obligé de veiller très souvent. Le maire demande une augmentation de son traitement. Le Conseil préfère lui attribuer une gratification en 1835.

Un débat a lieu au sujet de l’agent spécial de police : « Il est malade depuis 3 mois et n’a pas pu poursuivre ses fonctions et on s’en est à peine aperçu » dit un conseiller. Le maire dit que l’action de cet agent supplée celle des adjoints à qui leurs occupations ne permettent pas de se livrer continuellement et journellement à faire la police dans les rues et cabarets. On met aux voix : 9 boules blanches (et 6 noires) : l’agent de police est conservé.

Le Conseil décide aussi, ce jour-là que tout conseiller qui sera absent trois fois consécutives sans avoir fourni d’excuse valable, « sans motif reconnu légitime », sera déclaré démissionnaire.

30 mai 1834 à Monsieur le Curé : « J’ai transmis au Commandant de la Garde Nationale l’invitation d’assister dimanche à la procession de la Fête-Dieu. Le chef de ce corps me fait connaître à l’instant qu’aucun officier ne veut se charger de prendre le commandement à la cérémonie ni même d’y assister. Il y a donc impossibilité absolue que la Garde y apparaisse en armes, celle-ci ne pouvant être commandée que par les chefs qu’elle a élus.

J’avais aussi l’intention de faire part de l’invitation que vous leur adressiez à MM. les membres du Conseil Municipal mais ceux-ci, fatigués de la longueur de la séance, se retirèrent plus tôt que je ne m’y étais attendu »

« Quant à moi, Monsieur le Curé, le Corps Municipal ne pouvant figurer convenablement dans une cérémonie publique sans y être placé sous la sauvegarde de la milice citoyenne, dont le service ne peut être requis pour une fête religieuse en raison de ce que notre droit public n’admet pas de religion de l’Etat, et MM. les gardes nationaux ne m’ayant pas exprimé le désir d’accompagner la procession, ainsi qu’ils le firent les deux années précédentes, fidèle à mes principes et à mes habitudes de citoyen privé, je m’abstiendrai d’y pa-raître »

5 juin 1834 : le maire Félix Lebreton, continue l’examen du budget de l’année 1835. Il examine notamment le projet de construction d’un parapet à la Torche et de réfection du pavé de la Rue de Couëré « depuis les halles jusqu’à la Grand Rue », mais lorsque le nombre de conseillers présents en séance devient insuffisant, il doit suspendre la séance.

13 juin 1834 : reprise de l’examen du budget : le lavoir public, l’entretien du chemin de St Aubin, les réparations dans la caserne de gendarmerie. Le « pont du marais » (qui se trouve sur le chemin de Châteaubriant à Bain de Bretagne) sera-t-il refait en bois comme avant, ou en pierres ?

Une personne de la ville, celle qui a fourni une chambre pour établir un lit de camp en 1832, réclame une indemnité vu que « le lit lui ôta la disposition de la chambre et surtout l’entrée d’un cabinet dont il condamna la porte ». Le conseil accorde une petite indemnité, bien que cette chambre n’ait servi de corps de garde que pendant un mois, et décide de faire enlever le lit « promptement ».

 Où coucher les gendarmes ?

13 juin 1834 : le maire fait donner « toute la publicité possible » aux demandes de couchage des nouvelles brigades de gendarmerie qui se présentent à Châteaubriant mais « aucun habitant ne s’est présenté au secrétariat de la mairie pour y faire la déclaration de fournir les objets nécessaires au couchage dont il s’agit »

Il écrit au sous-préfet : « Je dois vous dire que l’indemnité accordée par homme et par jour ne me paraît point assez élevée et qu’il y a chez les habitants certaine répugnance à satisfaire à ces sortes de fournitures, répugnance qui n’est peut-être pas sans fondement à raison du peu de soin que les militaires prennent des effets qui leur sont fournis »

19 juin 1834 : le maire remercie M. Victor Duhamel de la Bothelière « du consentement que vous avez bien voulu donner pour que la ville puisse appuyer sur le mur de clôture de votre jardin, près le jardin public, le faîtage et les chevrons de la galerie qu’elle se propose de construire pour mettre à l’abri les personnes qui viennent laver à ce bassin ».

21 juin 1834 : les opérations électorales commencent ce jour. « Un piquet de 20 à 25 hommes de la Garde Nationale est mis à disposition du Président Provisoire du Collège Electoral de Châteaubriant pendant la durée des opérations »

 Les punaises

5 juillet 1834 : il y a un désaccord entre la ville et les autorités militaires. Celles-ci veulent que le Corps de Garde et le Poste de Police fassent partie du logement dû par les habitants. Le maire répond que ce n’est pas une charge communale et que les frais doivent être pris en charge par le gouvernement. « Il s’ensuit que la ville de Châteaubriant ne peut faire la dépense exigée pour désinfecter des punaises le lit de camp du Corps de Garde , ni fournir à son compte la paille nécessaire à la salle de police ». Quant au local qui sert de salle de police, « cet appartement est vaste, bien carrelé et éclairé par une croisée qui, si elle était ouverte de tems à autre, ferait disparaître cette prétendue insalubrité »

Les autorités militaires manifestent leur mécontentement et menacent de retirer la garnison de Châteaubriant . Mais le maire ne se laisse pas intimider : « Je déclare n’avoir aucun avis à donner ni vouloir assumer aucune responsabilité à cet égard »

10 juillet 1834 : le Conseil Municipal était convoqué à 2 h, la séance a été levée à 3 heures, faute d’un nombre suffisant de conseillers.

13 juillet 1834 : M. Gautron n’est plus locataire de l’hôtel Duboisdulier. La ville le reconnaît quitte de toute réparation.

Le « Pont du Marais » sera refait en pierres, la commune de Rougé participera aux travaux, mais n’a pas encore déterminé le montant de sa participation. La réalisation attendra donc.

8 août 1834 : les conseillers présents ont attendu une heure en vain. La réunion de Conseil est suspendue, faute de « combattants » !

10 août 1834 : la commune de Rougé s’engage à payer environ le cinquième du prix prévu pour le Pont du Marais. Châteaubriant décide de faire les travaux au plus vite.

 Le haut du pavé

Le Conseil décide de faire paver la rue Basse : « il a été reconnu que l’impulsion de l’eau serait bien plus forte en maintenant le ruisseau au milieu de la chaussée et en élevant uniformément les rives de chaque côté ». C’est ce genre de situation qui a provoqué l’expression « tenir le haut du pavé ». Selon Jean-Pierre Leguay (dans son livre « La Rue au Moyen-Age », « par forte pluie, les pavés humides ou les cailloux roulés employés comme revêtement, devenaient glissants et dangereux. Le piéton a tendance, pour éviter le dés-équilibre, à raser les murs, à suivre le haut du pavé, apparemment plus sûr mais où l’attendent d’autres risques : son pied peut se tordre ou s’embourber dans une rigole latérale et il est à la merci du jet d’une gouttière mal orientée ou de l’éclaboussure d’un liquide nauséabond expédié d’une fenêtre ». Au XIXe siècle la situation ne différait guère de celle du Moyen-Age !

15 août 1834, au conseil municipal de Châteaubriant, le maître de l’école d’enseignement mutuel se plaint des nombreuses absences de certains élèves pendant le second trimestre de l’année 1834. Une commission est chargée de s’enquérir des motifs qui les ont empêchés de fréquenter l’école « de façon fréquente et multipliée »

Ce même jour est lue une pétition des habitants du Faubourg de Béré qui réclament des réparations urgentes au lavoir et à la Fontaine Saint Jean « qui est dans un tel état de dégradation qu’on ne peut plus y laver proprement ou y puiser de l’eau propre et saine ». Cette demande est accompagnée d’un devis estimatif et d’une collecte de 62 francs faite par les habitants qui proposent en outre d’y consacrer « deux journées de harnais »

15 août 1834 : un conseiller municipal, à Châteaubriant, demande qu’il soit pris des mesures pour que l’eau de la fontaine de la Vannerie soit mise à la portée de ceux qui vont y puiser, et qu’une autre source plus rapprochée de la ville soit recherchée.

21 août 1834 : le maire Félix Lebreton, demande au sous-préfet l’autorisation de réunir le Conseil Municipal pour affaires relatives à la nouvelle horloge (qui n’est toujours pas livrée !) - et pour envisager des réparations au lavoir public de St Jean. Les habitants ayant fait une collecte s’élevant à 62 francs, il resterait 189 francs à la charge de la ville.

Ce même jour, une lettre du directeur des Arts et Métiers d’Angers évoque le cadran de l’horloge et la refonte du timbre. Le Conseil Municipal décide que « le cadran en bois sera remplacé par un cadran en lave volcanique qui sera placé à l’endroit occupé actuellement par la lucarne au midi et au dessus du cabinet où est placée l’horloge actuelle ». On apprend qu’il faut envisager 250 francs de plus pour divers changements dans le mécanisme. Mais l’horloge n’est toujours pas livrée.

 Encore les punaises !

25 Août 1834 : revoilà les punaises. L’autorité militaire n’ayant rien fait à ce sujet, le Conseil Municipal vote une avance de 20 francs « pour donner aux militaires de garde le repos qui leur est si nécessaire et pour empêcher que les habitans ne soient infectés d’insectes aussi sales que malfaisans »

27 août 1834 : le Conseil municipal fait la liste des enfants de 6 à 14 ans. Les 50 premiers seront exemptés de la rétribution mensuelle à l’instituteur et 67 autres enfants indigents, classés de 14 ans à 6 ans, recevront l’instruction gratuite pendant un an à compter de leur admission ... quand il y aura de la place à l’école.

Le Conseil examine les moyens de mettre la fontaine Saint Jean « à l’abri des grandes eaux qui y refluent l’hiver et la troublent »

Un membre du Conseil Municipal explique que, depuis 2 mois et plus, le Corps de Garde situé Grand Rue, occupé par la troupe de ligne, « est tellement infesté de punaises que non seulement les militaires en sont incommodés mais qu’en descendant la garde ils les portent chez les habitants qui les logent ce qui ne sert à rien moins qu’à en garnir toutes les maisons de la ville ». Le maire répond qu’il en a informé le Préfet et qu’il n’a reçu que des réponses dilatoires, et que la dépense de désinfection n’est pas à la charge de la ville. Mais cependant, en la circonstance, « vu les inconvénients graves liés à ces insectes malfaisans », le Conseil décide la désinfection complète.

 Le timbre fondu

4 septembre 1834 : le maire s’adresse à M. Voruz, fondeur en cuivre à Nantes, « Je vous fais remettre l’ancien timbre de l’horloge de notre ville que vous devez refondre. Ce timbre pèse 313 kg et d’après nos conventions, il ne pourra être brisé et jeté à la fonte qu’en présence d’une personne déléguée par M. le Maire »

22 septembre 1834 : le maire écrit au chef de travaux de l’école royale des Arts et Métiers d’Angers, pour savoir la date de livraison de l’horloge. « J’attends de vous une réponse prompte car il est enfin tems que les habitants de Châteaubriant connaissent l’heure à laquelle ils vivent et c’est ce qu’ils ignorent aujourd’hui puisque la ville ne possède plus d’horloge »

23 septembre 1834 : un aubergiste de Châteaubriant est condamné à une amende de 5 francs pour contravention à la police du roulage (défaut de plaque à sa voiture)

22 octobre 1834 : le Conseil municipal est réuni pour tirer au sort la moitié de ses membres qui doivent sortir en 1834 conformément à la loi du 21 mars 1831. Apparemment, le Conseil municipal est divisé en 3 sections. Dans la première il n’y a que 3 conseillers à tirer au sort car un quatrième est démissionnaire et un cinquième est décédé. Dans la deuxième section il y a trois sortants. Dans la troisième section il y a quatre sortants. (ndlr : revoir les trois sections au 14 novembre 1831)

23 octobre 1834 : toujours pas d’horloge. Le maire se fâche : « Je viens vous demander si vous avez entendu traîner indéfiniment la ville de Châteaubriant pour la livraison de notre horloge. Voici deux ans que vous avez traité avec moi la fourniture d’une horloge, fourniture que vous deviez effectuer dans l’année et j’en suis encore à savoir le jour ou plutôt à quelle époque la ville pourra en jouir. C’est je vous l’avoue un peu fort » écrit le maire.

28 octobre 1834 : enfin voici l’horloge ! Mais le Directeur de l’Ecole des Arts et Métiers d’Angers estime qu’il n’est pas possible de placer le cadran de l’horloge dans la lucarne, comme prévu, et que ce serait mieux de le placer au dessus de la petite porte d’entrée de l’église. Il ajoute qu’il est nécessaire que l’horloge soit renfermée dans une boite vitrée et que le tourniquet soit en fer et non en bois. Mais ce n’est pas tout ! Il explique que « pour descendre le timbre il a fallu retirer le vieux plomb qui recouvrait la plateforme de la campanille », et qu’il faut maintenant le remplacer par du plomb neuf. ... Bref l’horloge est là, mais elle ne sera pas installée de sitôt ...

D’autant plus qu’il y a encore le timbre à fondre ! Le maire réécrit à M. Voruz fondeur à Nantes : « Nous venons de recevoir notre nouvelle horloge et l’on travaille à disposer les lieux où elle doit être établie avec tous ses accessoires. Il convient donc, monsieur, de ne pas différer de vous occuper de la refonte de notre ancien timbre afin que nous puissions avoir le nouveau dans le délai de 8 jours ». Le maire renouvelle sa demande le 14 novembre suivant... Encore en vain.

14 novembre 1834 : lettre à l’ingénieur des Ponts et Chaussées : le maire y rappelle qu’en 1827 l’administration des Ponts et Chaussées a demandé à la ville de Châteaubriant de contribuer aux dépenses à faire pour le rétablissement du mur de soutènement de la chaussée de la Torche dont une partie est écroulée, et a demandé si la ville consentirait à supporter seule les frais de construction d’un parapet. La réponse a été oui, mais sept ans plus tard les travaux ne sont toujours pas faits. Le maire demande de ne plus tarder : « l’urgence est tellement impérieuse qu’il vous appartient de faire tous vos efforts car il ne sera bientôt pas possible de s’en occuper à cause des eaux »

22 novembre 1834 : le timbre de l’horloge se fait attendre. M. Delourmel, appelé à siéger à la Cour d’Assises, se rendra à Nantes le 1er décembre.

Une lettre demande à M. Voruz, fondeur de cuivre, de prendre ses dispositions pour être prêt à procéder à la casse de l’ancien timbre et à la refonte du nouveau. Mais M. Voruz demande encore un délai jusqu’au 13 décembre, et le 15 décembre ce n’est toujours pas fait : « Vous m’obligez à croire que cette affaire est pour vous d’un faible intérêt. Pour nous elle est de la plus grande importance. Je vous préviens que si dans le délai de 8 jours notre timbre n’est pas fondu, et arrivé à Châteaubriant, vous pourrez vous considérer comme totalement dégagé et nous aviserons à prendre les moyens qu’il conviendra pour terminer cette malheureuse affaire » dit le maire.

 Pas de comédien ambulant !

7 décembre 1834 : L’horloge n’est pas le seul souci. Le maire doit faire face aux règles liées au droit de propriété . Voici à ce sujet la lettre que Martin Connesson, qui loue un appartement à la commune pour servir de mairie, a envoyée au maire, ce 7 décembre 1834 : « Monsieur le maire, hier matin un comédien ambulant s’est présenté chez moi, de votre part, pour me demander la permission de jouer dans la grande salle de la mairie. Je la lui refusai, ne me croyant pas le droit de la donner et n’en ayant pas l’intention. (...) Cependant une affiche imprimée avec permission de Monsieur le Maire annonce ce spectacle pour ce soir à la mairie (...). Je vous avoue que d’après les clauses du bail signé par vous et moi, il y a quelques jours, j’ai peine à comprendre le peu de respect que vous portez à votre signature. (...). Je m’oppose donc, autant que je le puis, à ce que le spectacle ait lieu dans les appartements de la mairie. Les clauses du bail suffiront pour motiver cette opposition, me réservant , du reste, toutes les voyes de droit »

(Rappelons que le 28 novembre 1834 a été signé ce bail pour 7 ans, du 24 juin 1836 au 24 juin 1843, pour l’établissement de la mairie et de ses accessoires. Le local est situé « Rue de la Porte Neuve, dans le bâtiment anciennement occupé par le Tribunal et au premier étage ». Il se compose d’une chambre ayant une croisée à l’Est, et un cabinet de latrines aussi vers l’Est, la dite chambre destinée à faire le secrétariat, — d’un grand cabinet à côté vers Midi avec une porte de communication et croisée à l’Est, pour être affecté à servir de dépôt aux armes de la Garde Nationale, — d’un salon rond avec croisée à l’Est et cheminée pour servir aux réunions du Conseil Municipal et pour l’élaboration des mariages — un petit cabinet à côté vers Midi porte de communication et croisée au Sud et terrasse à l’Est, destinée au bureau du maire — une galerie pour servir de bûcher, ayant des croisées au Sud et à l’Est et communiquant avec la pièce suivante : une grande et belle pièce ayant deux croisées au Sud, une au Nord et deux cheminées devant être affectée au service des fêtes publiques, du recensement et des élections). Le loyer est de 300 francs/an.

11 décembre 1834 : installation des 12 nouveaux conseillers municipaux. En levant la main droite, ces élus jurent « fidélité au Roi des Français, obéissance à la charte constitutionnelle et aux lois du Royaume »

14 décembre 1834 : au Conseil municipal on reparle du coût d’installation de l’horloge tant attendue : « peinture, fronton, crampons en fer pour consolider la corniche du fronton, consolidation de la campanille, deux soliveaux en fer pour supporter le timbre », etc. A part ça, l’horloge n’est toujours pas installée !

 Une indécente clôture

Ce jour-là un conseiller fait une déclaration à propos du cimetière : « Chacun de vous a sans doute gémi comme moi quand, accompagnant à son dernier gîte le corps d’un proche ou d’un ami, il a vu l’état de délabrement dans lequel se trouve notre cimetière désormais envahi par la ronce et à peine protégé par une indécente clôture contre la souillure des animaux les plus immondes »

Il fait alors des propositions détaillées « étroitement liées au sentiment de pitié publique et de sainte morale ». Il propose que le "cimetière Saint Vincent" « qui n’est plus employé qu’à la sépulture des cadavres de l’hôpital » soit affecté, comme l’autre, aux sépultures générales « dans un ordre méthodique et invariable ».

 Cimetière des pauvres

« Il perdrait par conséquent la dénomination vulgaire et immorale de cimetière des pauvres car l’empire de la mort est le véritable empire de l’égalité »

« Si la réunion du cimetière Saint Vincent ne procurait pas un agrandissement convenable, je voterais volontiers l’acquisition d’une partie de l’une des propriétés contiguës. Les besoins du moment ne doivent pas être seuls envisagés, il faut considérer aussi ceux qui résulteront de l’accroissement de population, non seulement par la multiplication des indigènes, mais encore par l’établissement probable de nouvelles familles que la situation avantageuse de notre ville au milieu de plusieurs et importantes grandes routes qui seront bientôt mises en parfait état, appellera sûrement à se fixer ici ».

« Il faudrait ensuite que ce rendez-vous commun des générations fut enclos d’une manière sûre et convenable. Enfin mon avis serait qu’il fut fait des plantations raisonnées qui auront le mérite d’offrir des ressources pour l’avenir par la vente des arbres et d’assainir l’air. Car il est certain que les grands végétaux ont la propriété d’absorber les myasmes putrides et finalement de présenter un coup d’œil grave, en harmonie avec la future destination du lieu »

 Ré-ouvrir Béré

Le même conseiller continue : « D’autre part, la vieille église de Béré à laquelle tant de si précieux souvenirs se rattachent encore chez la génération actuelle, et qui ne sert pas, par suite de l’augmentation de la population pourra être rendue au service du culte paroissial. Et d’un autre côté la voûte antique qui réunit le cimetière ordinaire et le cimetière Saint Vincent, sont deux points avec lesquels il faudra ensemble s’appliquer à marier l’ordonnance de la restauration du cimetière et de la plantation qu’il réclame ». [voir la carte page suivante : le cimetière ordinaire et le cimetière des pauvres sont reliés par un pont (ou arcade) qui passe au-dessus du chemin creux, qu’il est prévu de supprimer ]

« il s’agit en effet d’une entreprise essentiellement populaire et pieuse, dont le principe me paraît devoir être admis sans contestation. Honorer la mémoire des personnes qui nous furent chères et nous préparer à nous-mêmes un azile (sic !) à l’abri des profanations, tel est le résumé de ma proposition ».

Le Conseil nomme une commission extraordinaire pour examiner les choses.

21 décembre 1834 : nouveau conseil municipal. D’abord le bureau de bienfaisance demande à la commune des fonds pour réparer les bâtiments de l’école charitable. Le Conseil considère que les réparations sont légères et qu’elles ne relèvent pas de la ville propriétaire. Renvoi aux dames usufruitières (c’est à dire aux dames religieuses de Chavagnes).

Le Directeur de l’école d’enseignement mutuel demande 17 francs pour 18 pieds de tuyaux neufs en fonte pour le poêle de l’école, les anciens étant percés ou « oxidés ». Des conseillers disent que la dépense incombe au directeur, puisqu’il est chargé du chauffage et de l’éclairage de l’école. Mais d’autres soutiennent que le poêle est fourni par la ville ainsi que les tuyaux, donc que la réparation doit être à sa charge. Le Conseil vote donc les 17 francs.

La commission chargée du cimetière estime qu’il est souhaitable de réunir par une seule clôture le cimetière Saint Vincent, dit "cimetière des pauvres", et le cimetière restant, et de supprimer le chemin creux qui est entre les deux, et qu’il faudra un mur de 2 mètres de haut, plutôt qu’une haie « quelqu’épaisse qu’elle puisse être ». « Ces travaux pourraient offrir 1600 tombes et donneraient les facilités de concessions de terrains pour monuments ».

 La Porte des Champs

Un autre Conseiller note qu’il y a trois ans, le maire a fait abattre une portion des Terrasses et a poussé les travaux jusqu’à l’entrée de la Porte des Champs. « Il en est résulté une dégradation telle que les voitures ne peuvent plus y passer et que les gens de pied, la nuit surtout, tombent en marchant et heurtent violemment le pavé surélevé de 8 pouces du sol » (ça fait 20 cm de dénivelé environ).

Le Conseil décide alors que le pavé restant sera démonté jusqu’au raz du Pavillon, du côté de la cour, que ces pierres seront brisées et employées en macadam, que le tout sera couvert de sable et que pour l’eau il sera pratiqué une petite rigole.

Et puis, l’heure étant avancée, la séance est levée.

Balzac

Septembre 1833, Honoré de Balzac a 34 ans. Celui qu’un journal satirique qualifie de « serpent tentateur des femmes »aime effectivement les femmes mûres, mais elles le font trop souffrir. Il vient de rompre avec la marquise de Castries une liaison passionnée ... mais platonique et, furieux, frustré, lui qui a déjà publié plusieurs romans (dont « Les Chouans »), il se lance dans la rédaction d’un nouveau roman qui commencera à paraître par épisodes dans la revue L’Europe Littéraire avant d’être édité en décembre sous le titre de « Eugénie Grandet ».

La duchesse de Langeais ; Le colonel Chabert, La comédie humaine, Le Père Goriot, Le lys dans la vallée, César Birotteau, Le cousin Pons . Balzac regroupera et réorganisera ses 95 romans « pour donner la vie et le mouvement à tout un monde fictif ». La plupart des romans de Balzac sont des romans d’apprentissage dans lequel le héros s’élance à la conquête du monde, éprouvant la contradiction entre son désir ardent, réussir, et les obstacles qu’oppose la réalité. L’ordre social est une mécanique qui broie les êtres les plus purs. Les héros de Balzac sont loin d’être des chevaliers ayant pour armes l’honneur ou la vertu, ils n’hésitent pas à accepter les corruptions sociales et l’opportunisme qui garantit le succès. Comédie humaine ...




Sources :

- Archives municipales série 1 D 18 et 2 D 8
- Histoire de la France et des Français
par A. Castelot et A. Decaux
(Editions Robert Laffont)
- Histoire du peuple français,
par Pierre Lafue et Georges Duveau
(Ed. Nouvelle Librairie de France)
- Les Rois de France, fiches Editions Atlas
- Itinéraires littéraires, XIXe s ; éd. Hatier

- Enseignement ménager par A. Brémant , Ed. Hatier -

- J.P. Leguay, la rue au Moyen-Age

(*) Hôtel du Boisdulier

On trouve dans les archives un acte du 21 juin 1828 par
lequel cet hôtel a été vendu à Nicolas-François Ballais, maire de Châteaubriant, par Madame Sainte-Marie Elisabeth Duboispéan, veuve de Monsieur le Président Guy René Pierre Gardin Duboisdulier). Au fil des années, l’orthographe a évolué : Hôtel Duboisdulier, Hôtel du Boisdulier, hôtel du Bois-du-Liers ....