14 Thermidor (1er août 1795) : les citoyens Martin Connesson, garde magasin des vivres de la ville et Pierre Besnier, administrateurs du District, obtiennent un certificat de civisme
15 Thermidor (2 août 1795) : le citoyen Jacques Aunet est accusé d’avoir « encloué » (??) les canons de Châteaubriant et en conséquence d’avoir voulu par cette action favoriser les ennemis de la République. Le citoyen François Ignace Janvier est appelé à témoigner à Nantes devant le tribunal criminel de la Loire Inférieure, mais il refuse de s’y rendre, parce que, vu le retard du courrier, « il n’a pas un délai suffisant pour s’y rendre » et il ajoute « qu’il ne s’y rendrait pas sans escorte, attendu que les routes sont infestées de brigands qui pillent, vollent et assassinent les passants et que, de plus, témoigner dans cette affaire lui fait appréhender la vengeance des chouans ». Quatre autres citoyens font une déclaration similaire à la municipalité.
Le même jour, le chef vendéen Charrette, qui a été battu par le général Hoche à Quiberon le 21 juillet dernier, fait assommer ses prisonniers républicains (200 à 300 soldats). La nouvelle, sitôt connue à Châteaubriant, n’est pas faite pour rassurer.
18 Thermidor (5 août 1795) : le citoyen Pierre Jarril, fermier du moulin à vent de la Garenne, constate que ce moulin a été mis hors d’état de servir par des brigands.
18 Thermidor (5 août 1795) : les certificats de civisme sont supprimés
19 Thermidor (6 août 1795) : la force armée a trouvé, sur la Lande du Bois Hamon, les voitures de quatre citoyens « de Louisfert, de l’Aubinais, de la Cocquerie et de la Courbetière » chargées du foin volé il y a quelques jours. La municipalité estime que, en un temps ordinaire, elle tiendrait les propriétaires de ces charrettes pour complices du vol. « mais dans la situation où se trouve ce pays occupé par les chouans, il en faut juger autrement.Quelque opposition ou quelque répugnance que ces habitants puissent témoigner à toutes ces horreurs, la certitude de la mort s’ils ne laissent pas tout prendre au gré des chouans, d’autre part le deffaut de moyens de s’opposer à leurs pillages, rend leur position très critique et très embarassante ». La municipalité décide donc de rendre leurs charrettes à leurs propriétaires car « il est de la dernière conséquence que ces habitants s’adonnent à leurs travaux agricoles. L’interret public le leur commande impérieusement et le comble de malheur naîtrait de l’abandon de la culture ».
22 Thermidor (9 Août 1795) : il est question de la désignation d’un garde champêtre à Châteaubriant comme dans toutes les communes de la République. (en vertu de la loi du 20 messidor, 8 juillet 1795). En fait la municipalité de Châteaubriant en désigne trois, « attendu la difficulté de parcourir les campagnes qui sont occupées par les chouans ».
Elle décide aussi de faire inscrire aux quatre portes de la commune l’injonction suivante : « Citoyen, respecte la propriété et les productions d’autrui. Elles sont le fruit de son travail et de son industrie »
23 Thermidor (10 août 1795) : ce jour est la célébration du 10 août 1792 qui vit la chute de la royauté. A Paris le ton est plutôt au désenchantement. Certains disent qu’ils aimeraient mieux être sous le régime de Robespierre, qu’alors la Convention avait soin des malheureux. « Aujourd’hui les représentants boivent, mangent et s’enrichissent aux dépens du peuple »
Le Franc
25 Thermidor : le citoyen Birien vient dire que « son enfant ramenant trois vaches et une génisse à luy appartenant, il fut saisi avec ses bestiaux par trois hommes armés qui touchèrent les bestiaux jusqu’aux landes du Druillay et emmenèrent l’enfant. Que rendu dans les landes ils le renvoyèrent mais ne voulurent pas lui laisser les vaches et dirent à l’enfant : si tu craint d’être grondé, vient avec nous »
26 Thermidor : dans la lande du Druillay une femme qui faisait paître les vaches des habitants de Châteaubriant a vu trois hommes armés lui demander de désigner « celles appartenant à la dite Duval ». Ils emmenèrent ces vaches en les réunissant à celles du citoyen Errien. Ils furent rencontrés au long de la forêt de Juigné. « Une des vaches est rouge avec deux grandes cornes et cloche du pied droit de derrière. La seconde est brune, garre sous le ventre et bien cornée »
28 thermidor (15 août 1795) : le franc devient l’unité monétaire légale. Il est approximativement identique à la « livre » de l’Ancien Régime
Poids et mesures
29 Thermidor (16 août 1795) : une série de question a été envoyée dans toutes les municipalités par « l’agence temporaire des poids et mesures » en application de la loi du 18 Germinal dernier. Par les réponses de la municipalité castelbriantaise, on apprend que Châteaubriant compte 2500 à 3000 individus « les circonstances actuelles ne permettant pas d’envoyer à la campagne des commissions à l’effet de vérifier la population ». On découvre aussi quelles étaient les pratiques en vigueur à l’époque :
Un boisselier fabrique des mesures de capacité, en bois, pour les grains. « Les menuisiers font des aunes et les serruriers des romaines » mais ce genre de fabrication n’est qu’occasionnel. (NDLR : l’aune est une mesure de longueur faisant environ 1,18 à 1,20 m. La romaine est une balance)
« Il n’y a pas d’artiste distingué dans aucun genre de mécanique qui puisse concourir à l’exécution des nouvelles mesures ou des capitalistes qui voulussent se livrer au genre d’entreprise »
Il y a un étalonneur public dans l’arrondissement, 23 marchands détaillants à l’aune ou autres mesures de longueur.
5 à 6 marchands forains viennent vendre les jours de marché.
L’aune dont on se sert est de 44 pouces dits de Roi. La verge est de 66 pouces. Elle ne sert qu’à mesurer la toile grise.
Il n’existe point de buis, mais il existe des chênes et des châtaigniers propres à faire des mesures de capacité pour les grains.
Il y a 24 marchands de vin ou cidre en détail et autres marchands dont le débit exige l’usage de mesures de capacité pour les liquides.
Il n’y a ni verrerie, ni manufacture de fayence ou autre espèce de poterie de terre, fonte ou autre espèce de métal.
Les matières employées pour les mesures de capacité usuelles pour le vin, le cidre, etc, sont l’étain, la terre et le fer blanc. Tous les liquides se vendent à la pinte de Paris.
« Il serait équitable de substituer sur les marchés, les poids aux mesures de capacité, mais il est plus commode de vendre à la mesure. Le vœu général est pour la mesure »
« Le boisseau de froment moyenne qualité péze 90 livres, poids de mare. Il faut trois mesures de demi-boisseau et trois mesures de huitième de boisseau pour le service de mesurage public de chaque marché »
On apprend aussi qu’en cette période de 1795 il n’y a à Châteaubriant « point de marchand grénetier, regratier, fruitier, vendant au détail ou à domicile » et que, depuis 3 ans les habitants des campagnes n’amènent plus de grains au marché. « Le marché était cy-devant très approvisionné, les propriétaires vendent l’excédent de leur provision ».
« Il ne se vend point de plâtre. Le charbon, la chaux se vendent à la barique. Le bois se vend à la corde : la corde a 8 pieds de longueur, 4 pieds et demi de hauteur et le bois a deux pieds de longueur dit de Roi »
« On se sert assez indistinctement de romaine ou de balance pour pezer »
« Il y a 6 bouchers, 8 épiciers, 4 moulins à eau et 3 moulins à vent, 12 boullangers. Ces derniers depuis 3 ans n’exercent plus leur mettier » . « Il n’y a point de marchand en gros, de marchand de fer de forges et usines ».
« On ne connaît que le poids de mare. Pour les grandes pezées on se sert de poids de 25 et 50 livres »
Enfin il y a un orfèvre et un droguiste-apothicaire et point de joaillier.
29 Thermidor : la citoyenne Louise Marguerite Dupont vient demander un certificat d’indigence lui permettant d’obtenir du gouvernement la pension accordée « aux veuves des deffenseurs de la patrie morts en activité de service »
Ce même jour la municipalité signale que l’embarras des routes et les difficultés de la poste font qu’elle n’a reçu que le 28 le bulletin de la Convention du 15 dans lequel il y a un décret ordonnant que le 23 Thermidor, anniversaire du 10 août (chute de la Royauté) soit célébré dans toutes les communes de la République. « De ce fait nous n’avons ou réunir nos vœux pour la prospérité de la république, à ceux de toutes les communes qui la composent ». La municipalité en consigne les regrets sur son registre des délibérations.
1er Fructidor (18 août 1795) : un député de la Convention propose « le décret des Deux-Tiers » comme moyen de terminer la Révolution. Il s’agit de « retenir les deux-tiers de la Convention dans le futur corps législatif ». Cette proposition vise à permettre aux Thermidoriens du centre (ceux qui ont renversé Robespierre lors du 9 Thermidor an II, c’est-à-dire le 27 juillet 1794) de perpétuer leur pouvoir et de résister à la marée montante du royalisme chez les riches.
La nouvelle Constitution
5 Fructidor (22 août 1795) : la Convention adopte la CONSTITUTION DE L’AN III et le « Décret de deux tiers » (voir 1er fructidor). Chacun des deux textes est proposé au référendum au suffrage universel. Une « déclaration des droits » revue et corrigée, est précédée d’une « Déclaration des Devoirs ». Le suffrage universel est supprimé. Les élections se feront à deux degrés, le second exigeant plus de fortune que le premier. Les suffrages populaires sont ainsi éliminés, permettant de donner plus de pouvoir aux riches.
6 Fructidor (23 août 1795) : décret de la Convention prononçant la dissolution de toutes les sociétés populaires (bien peu nombreuses) qui existaient encore.
9 Fructidor (26 août 1795) : Jean Caridel, fermier de la Métairie de la Porte Duparc raconte que « la veille, vers soleil levant, ses vaches arrivant dans la pâture des Landes Duparc furent saisies par 4 hommes armés qui, de suite, les firent sauter dans le chemin conduisant à Juigné et les emmenèrent en disant à la pastre : que celuy auquels elles appartiennent vienne les chercher à Erbray ». Il ajoute que ces vols lui ont été faits en punition de ce que, contre le vœu des chouans, il charroyait des provisions pour les magasins de la République.
10 fructidor (27 août 1795) : pétition de 30 habitants de Châteaubriant qui rappellent l’état de dénuement du marché « provenant de l’embarras occasionné par les chouans qui environnement dette ville ». L’assemblée du Conseil Général de la commune dit qu’il faudrait plus de troupes qu’il n’y en a dans le District pour protéger les arrivages dans Châteaubriant des denrées de première nécessité. « En attendant qu’il soit pris des mesures générales pour détruire ou faire rentrer dans l’ordre les rebelles connus sous le nom de chouans »
11 fructidor (28 août 1795) : lecture est faite de l’arrêté du département de Loire-Inférieure, au sujet « des progrès effrayants que fait la désertion dans plusieurs armées de la République ». Dans l’Ouest on note que ces militaires déserteurs sont « tous bretons »
La municipalité estime qu’il est urgent d’arrêter sans délai l’épidémie de désertion qui menace d’une désorganisation totale les armées de la République. Elle demande au commandant de la gendarmerie de Châteaubriant d’interroger « tous les individus qui luy paraîtront bons à interroger sur leur résidance sur ce territoire et de produire les congés en vertu desquels ils séjournent cy ».
Ce n’est pas un hasard si un député de la Convention proposait, le 28 juillet 1795, une amnistie à la foule des soldats que l’extrême misère des armées faisait déserter : sur un effectif théorique de 1 100 000 hommes on ne comptait plus que 454 000 présents.
12 fructidor (29 août 1795) : un membre de la municipalité déclare : « il nous reste à poursuivre une infinité d’abus que des malveillans commettent depuis quelques tems. Les uns se tiennent dans les faux bourgs, loin de la surveillance de la ville. D’autres plus coupables encore, contre toutes les loix, insinuent aux cultivateurs qu’ils les payeront en monnaye numéraire lui supposant plus de valeur qu’à la monnaye assignat. Ils manquent ensuite à leur promesse. de là une foule de querelles qui toutes réussissent à éloigner le propriétaire de beurre, oeufs, volailles et autres menues provisions, de venir en partager la ville et d’emporter en échange les objets que les habitants peuvent avoir à leur convenance ».
La municipalité arrête donc qu’il demeure « deffendu de vendre ou acheter ailleurs qu’au marché » et que les cultivateurs trouveront liberté et protection au marché. Encore faut-il pouvoir faire respecter cet arrêt ....(voir plus loin : 21 septembre)
12 fructidor (29 août 1795) : les habitants de Châteaubriant donnent à boire la nuit aux militaires « après la retraite battue ». La municipalité rappelle que c’est défendu parce qu’il peut en résulter les plus grands inconvénients.
La hausse des prix
13 fructidor (30 août 1795) : a propos du salaire des boulangers de l’armée qui réclament de l’augmentation, la municipalité discute de la hausse des prix : « la corde de bois qui valait 10 livres 10 sous, valait dans les derniers temps 400 francs. La chandelle de 23 sous la livre est venue à 40 francs. Le botteleur de foin du magasin auquel il est payé 40 sous en numéraire gagne infiniment plus que le garde magasin employé d’un grade supérieur et le dernier des manœuvres par exemple ne voudrait pas du sort du secrétaire-greffier de cette municipalité »
Fin de la Société populaire
16 Fructidor (2 septembre 1795) : l’assemblée de la municipalité a reçu le bulletin de la Convention du 6 fructidor dans lequel on trouve ce décret : « Toute assemblée connue sous le nom de club ou société populaire est dissoute. En conséquence les salles où les dites assemblées tiennent leurs séances seront fermées sur le champ et les clefs en seront déposées ainsi que les registres et papiers dans les secrétariats de la maison commune. Ainsi disparut la Société Populaire de Châteaubriant qui, à dire vrai, n’était plus très vigoureuse.
Le registre de la Société Populaire de Châteaubriant se termine en effet par ces mots : « le présent registre ainsi que tous les papiers et ustensiles de la Société, ont été portés au secrétariat de la municipalité en vertu du décret de la Convention Nationalle qui anéantie les sociétés populaires, décretté dans le courant de ce mois de fructidor de la présente année républicaine ».
Et toujours les Chouans
16 fructidor (2 septembre 1795) : un citoyen se plaint du vol de son cheval dans un pré au derrière de la Maison de la Fayère. Un autre se plaint du vol d’une jument sur la route de Martigné. Une femme se plaint d’un vol analogue du côté de Chanteloup.
20 Fructidor (6 septembre 1795) : assemblée primaire des habitants de Châteaubriant, dans la Maison St Nicolas, à 8 heures du matin, pour présentation de la constitution. L’assemblée l’adopte.
22 Fructidor (8 septembre 1795) : depuis le 1er Prairial an II (20 mai 1794), les citoyens Margat (alors Maire) et Bobe, sont des « magistrats lecteurs » chargés de faire lecture des lois les jours de décadi dans la salle d’audience. Le premier désire être remplacé dans cette fonction. Delourmel est désigné pour cette tâche.
5e jour complémentaire de l’an III (21 septembre 1795) : un membre de la municipalité dit : « Vous éprouvez bien des contradictions dans le projet que vous avez conçu de rétablir le marché en cette cité. Vous avez promis aux habitants des campagnes sûreté et protection dans leur commerce avec la ville et il faut en convenir, ils n’ont pas éprouvé parfaitement l’effet de ces promesses » - « Le 12 fructidor vous avez pris une délibération sage que vous avez adressée au citoyen commandant de la force armée. Toutes ces précautions n’ont pas amené l’ordre indispensable pour que les provisions arrivent au marché sur les places ordinaires. Les malveillans vont à leur rencontre dans les faux-bourgs, les arrachent à ceux qui en sont porteurs, les payent mal et souvent ne les payent pas du tout. Il vous reste à faire un dernier effort pour parvenir à rétablir l’ordre que le bien public attend de votre énergie » . La municipalité demande alors que la force armée veille dans les faux-bourgs les jours de marché .
C’est facile à dire, mais quelques jours plus tard, le 5 vendémiaire (27 septembre), la municipalité sera obligée de reconnaître que la force armée en profite pour se servir en priorité. Elle décide donc que « les citoyens qui composent la force armée ne pourront acheter des denrées de première nécessité les jours de marché avant midi tant dans la ville que dans les faux-bourgs, sinon ils mettent les autres citoyens dans le cas de manquer de tout »
Le mètre
1er Vendémiaire an IV (23 septembre 1795) : la Constitution de l’an III est proclamée « loi fondamentale de la République ».
Ce même jour, l’usage du mètre, comme unité de longueur, est rendue obligatoire à Paris. Il remplace donc l’aune, la verge, le pied, etc.
La confédération d’Ercé
(extrait des mémoires du général Léopold Sigisbert Hugo) :
« Dix-sept communes des environs d’Ercé voulurent se garantir des malheurs qui avaient désolé le pays d’outre-Loire » (NDLR : il s’agit de la révolte des Vendéens). « Le curé de ce village, homme sage et vertueux, prêchait sans crainte et constamment la soumission aux lois ; il retenait le cultivateur à sa charrue, le propriétaire à son domaine et le marchand à son négoce. Les communes dont je parle, voyant l’heureux résultat de la conduite évangélique de ce vertueux pasteur, s’entendirent avec lui et la troupe qui protégeait les forges de Martigné. Alors une ligne offensive et défensive fut arrêtée entre eux. Les chouans paraissaient-ils sur le territoire confédéré ? On y sonnait le tocsin ; quelques coups dans les intervalles indiquaient la direction de l’ennemi et, de toutes parts, on marchait à sa rencontre. Les chouans se bornaient-ils à prendre du bétail, à tuer quelques hommes ? Un parti d’élite allait enlever à l’ennemi d’autre bétail en nombre double et ne rentrait qu’après avoir pris ou tué le double d’ennemis.
La persévérance dans ces mesures rendit le territoire confédéré si respectable, que les chouans n’osèrent plus y mettre les pieds. Le courrier de la poste traversait ce territoire pour venir à Châteaubriant ; il changeait d’escorte à Martigné, bourgade distante de trois lieues de ce premier point, et cette escorte se relevait à un rendez-vous connu d’avance par un détachement de Châteaubriant, fort d’environ 50 hommes, tous du 8e de Somme et des canonniers du Bas-Rhin.
Le général Hugo raconte ensuite comment la garnison des forges fut attaquée et mise à mal par 10 à 12 000 chouans, malgré la présence d’une escorte de 150 hommes sous la direction de capitaine Schmit. « Tout-à-coup la scène change ! Une très vive mousqueterie se fait entendre derrière les chouans qui, pris entre deux feux, s’ouvrent en désordre et bientôt cherchent de toutes parts leur salut dans la fuite ! Les républicains voient alors arriver à eux une masse énorme de paysans armés et couverts, pour panaches, de feuilles de feuillage. Leur général à cheval, ce digne curé d’Ercé, accourt au brave Schmit et au commandant de Martigné qu’il embrasse. Les chouans, qui tremblaient au seul nom de la Confédération d’Ercé, abandonnèrent le champ de bataille couvert de leurs morts »
(extrait du livre de Charles Goudé)
Sainte Pataude
En bordure de la commune de Teillay, à la limite des départements d’Ille et Vilaine et de Loire-Atlantique, tout près d’une grande ligne forestière, sous un chêne marqué d’une croix rouge, s’ouvre une sente qui conduit à une tombe, une tombe recouverte d’un amas de fleurs naturelles ou séchées, de messages d’espoir ou de supplication, d’enveloppes cachetées que nul n’ose violer. Tout autour de la tombe, des fils tendus entre les arbres portent des vêtements, d’enfant le plus souvent. C’est "La Tombe à la Fille". Une légende, une histoire s’y attache.
L’histoire de Marie Martin a été contée dès 1797 par l’ancien notaire de Bain de Bretagne, dans une lettre adressée au Commissaire Général du Directoire exécutif près de l’administration centrale du département d’Ille et Vilaine. La voici :
Au commencement de l’an V, septembre-octobre 1795, une jeune fille de Tresboeuf (elle avait 19 ans) fut saisie par les chouans. Ils satisfirent leur brutalité. Ensuite, successivement, ils lui arrachèrent les ongles des pieds et des mains, les dents, les yeux et lui coupèrent les mamelles, ils mirent trois jours à tourmenter cette malheureuse victime de leur rage et de leur barbarie. Enfin, voyant qu’ils n’allaient bientôt plus exercer leur cruauté que sur un cadavre, ils la pendirent à un arbre de la forêt de Teillay, ne lui laissant pour tout vêtement que sa chemise. Elle a été détachée de cet arbre et enterrée au pied.
Dans un petit ouvrage fort bien fait , J.M. MARTIN fait le point sur l’histoire de cette "Fille" : "Marie Martin se trouvait en chambre chez Jean Martin (qui n’était pas son oncle), marchand au bourg de Tresboeuf. Cet homme avait acquis des biens de la Nation et était recherché par les chouans. Ceux-ci étaient très bien renseignés, ils avaient leurs informateurs sur place ou faisaient parler les gens. Au début de l’an IV (fin 1795), ils se présentèrent chez le marchand afin de lui faire payer son attachement à la République et ses acquisitions. Marie étant seule, elle ne voulut pas révéler où se trouvaient ses maîtres. Alors ils l’emmenèrent à sa place. C’est ainsi qu’elle joua un rôle de substitution. De toutes manières, elle fut enlevée au domicile du marchand où les chouans avaient rendez-vous".
Horrible histoire du passé. Lieu de pélerinage du présent , la "Tombe à la Fille" reçoit de nombreuses visites, afin de demander des grâces, par curiosité ou en but de promenade. Le dimanche, par beau temps, il peut y avoir 500 visiteurs !